Par leur caractère souvent grandiose, les lieux de culte offrent des volumes hors normes. De leur nouvel usage dépendra la mise en place de planchers intermédiaires. La conservation de l’enveloppe passera par sa rénovation.
La reconversion des lieux de culte désacralisés présente de nombreuses contraintes. Une solution simple et peu coûteuse consiste à transformer le temple ou l’église en salle de spectacles. C’est le cas de la salle Olivier-Messiaen, à Grenoble, une ancienne chapelle du couvent des Minimes devenue salle de concert pour orchestre de chambre. En dehors de la rénovation proprement dite et de la mise aux normes (d’accessibilité notamment), la transformation consiste essentiellement à sonoriser le lieu, à installer des sièges en gradins pour les spectateurs et à corriger la forte réverbération de la pierre à l’aide de matériaux absorbants. Mais, attention, l’Église veille à la destinée des lieux, même après leur désacralisation ! Une exception notable est celle du club Paradiso : la plus grande discothèque d’Amsterdam est une ancienne église construite à la fin du XIXe siècle, devenue en 1968 un « temple de la drogue ».
Redécoupage
Il arrive fréquemment que le volume atypique de la nef soit redécoupé. Les temples les plus petits peuvent être réaménagés en lofts ou en appartements de standing. Ainsi, en 2003, l’agence CCD Architecture a fait de l’ancien temple protestant de la rue Tilsit, à Marseille (6e arr.), une villa de prestige de 350 m2 avec cinq chambres. La pose d’une dalle intermédiaire a permis d’ajouter un étage. La partie haute de la nef est devenue un vaste salon éclairé en toiture par une verrière Art déco. Un autre bel exemple est donné par l’hôtel Mercure, à Poitiers, une ancienne chapelle des jésuites transformée par les soins de l’architecte François Pin. Le grand volume de la nef et du cœur a été coupé horizontalement en deux, avec, en partie haute, un cloisonnement en chambres de prestige et, en partie basse, une salle de restaurant de grande hauteur.
Embûches
La rénovation partielle ou totale de volumes atypiques rend ces projets complexes. C’est ce qu’a vécu l’architecte Frank Longueval (Atlante Architectes), à Wattignies (Nord), pour un projet de création de 17 logements sociaux conduit par Habitat du Nord. L’église de l’Arbrisseau, désacralisée et laissée à l’abandon, avait été construite en briques dans les années 1930. « Si la nef était tristement banale, la façade et son tympan, le parvis et deux petites absidioles étaient en revanche d’assez jolie facture, dans un style Art déco, confie l’architecte. De plus, cette façade fermait la perspective d’une impasse et faisait partie de la mémoire collective du quartier. Elle méritait d’être conservée. » Aussi seuls ce pignon et les deux absidioles ont-ils été rénovés et conservés. Mais le projet s’’est avéré coûteux. Du fait de la présence d’amiante et de fientes de pigeon, la nef a dû être démolie sous sarcophage, sans toucher au fronton. L’ensemble était bâti sur une ancienne carrière de calcaire (une catiche) qu’il a fallu combler. Des fondations profondes avec pieux se sont avérées nécessaires ainsi que la mise en œuvre d’une autre dalle. Structurellement, la nouvelle partie a été accrochée au fronton. « Pour rénover la partie conservée, il a fallu procéder à un ravalement complet. Mais, en définitive, tout le monde se félicite du choix, tant les occupants des logements que les habitants du quartier », résume Frank Longueval.