À l’emplacement d’une ancienne friche industrielle près du centre-ville de Nancy se dresse désormais Quai Ouest. Accueillant des bureaux, une résidence hôtelière et des commerces, ce bâtiment en béton se distingue par sa peau métallique percée de baies oblongues.
Le bâtiment d’angle conçu par l’architecte Anne Démians face à la Meurthe se devait d’avoir de l’allure. Un nouveau Nancy se dessine sur l’autre rive, selon les contours des Jardins d’eau d’Alexandre Chemetoff et un alignement de logements collectifs contemporains. Il fallait du répondant pour cette porte d’entrée vers le centre historique, à quelques rues seulement de la place Stanislas. Quai Ouest, dont les premières esquisses ont été présentées en 2010 au maire d’alors, André Rossinot, a rapidement reçu l’aval de l’équipe municipale. L’architecte parle « d’énergie politique et de force de frappe ». Celle qui dit faire « acte de résistance » pour valider ses choix, tout en restant dans un budget « raisonnable », a pu, sur ce projet, baisser la garde. Le maire était un soutien précieux. Il avait une exigence sur la qualité des matériaux utilisés et sur la nécessité d’éviter une « architecture banale, sans relief et sans histoire ».
Isolation thermique par l’extérieur
À l’emplacement d’une ancienne usine de production de gaz et dans le cadre de l’opération immobilière Île de Corse se dresse donc aujourd’hui un bâtiment compact en R+5 et R+4. Entièrement enveloppée d’une peau métallique en inox, cette construction en béton est perforée de trous ovoïdes dans lesquels ont été placées les fenêtres. Le béton étant le cœur de métier de Pertuy Construction, le constructeur du bâtiment et occupant de la moitié de la surface des bureaux souhaitait montrer son savoir-faire. Si la structure poteaux-poutres est des plus classiques, c’est sur les voiles que l’entreprise a fait preuve d’originalité. Pour les réservations des ouvertures, un mannequin en résine reprenant la forme exacte de la fenêtre et de son embrasure conique selon la trame décidée par l’architecte a été fixé mécaniquement sur les banches. Le béton autoplaçant a fait le reste, avec une précision de l’ordre de 8 mm. Afin de « rendre la construction moins écrasante » et de ne plus distinguer le toit, Anne Démians a choisi de faire partir le dernier niveau en arête fuyante. Les voiles, inclinés à 30°, ont été réalisés avec des outils particuliers à usage unique.
Aussi réussi soit le bâtiment, ce n’est pas le béton mais la vêture métallique qui crée l’identité architecturale de Quai Ouest. La peau, constituée d’une tôle en inox 304 de 15/10e d’épaisseur, est rivetée sur une ossature tubulaire horizontale, elle-même accrochée à des écarteurs en aluminium. Il s’agit d’une isolation thermique par l’extérieur (ITE) comprenant l’isolant en laine de roche, le pare-pluie et la vêture métallique. L’entreprise Le Bras Frères, spécialiste du bardage et de l’étanchéité, est habituée aux opérations délicates, notamment dans le cadre des monuments historiques. Pour Quai Ouest, le plus épineux aura été de concevoir et fabriquer les embrasures coniques, des pièces réalisées à l’unité à la rouleuse en atelier. Pour ces 650 fenêtres en bois (la moitié d’entre elles sont basculantes, l’autre moitié, fixes) qui parsèment selon une trame régulière les 5 000 m2 de façade, l’entreprise a également réalisé les casquettes brise-soleil, les « paupières » comme les désigne Anne Démians. Celles-ci sont en tôle inox 30/10e et ont été découpées au laser. La pose de la peau a été effectuée par dix personnes, en six mois, à l’aide d’un échafaudage. Côté entretien, plusieurs pistes sont envisagées, et notamment un polissage mécanique fin de la surface tous les cinq à six ans. Il est capital de redonner régulièrement à Quai Ouest son éclat initial.