© (Doc. Terreal.)
Auparavant utilitaire, le bâtiment agricole doit maintenant être en mesure de s’insérer dans un process hygiénique contraignant auquel répondent structure et matériaux d’enveloppe.
Bois ou métal pour la structure, fibres-ciment pour la couverture, bois et bac acier en parois verticales sont les tendances actuelles des bâtiments agricoles. Des ouvrages très divers qui recouvrent les stabulations (de loin les réalisations les plus importantes), les bâtiments de stockage, les bergeries, porcheries, poulaillers et plus généralement tous les bâtiments d’élevage dits « hors sol ». Chaque famille possède ses contraintes, qui ont évolué du fait de nouveaux modes de production, d’une mécanisation poussée, mais aussi face à des impératifs accrus d’ordre sanitaire ou environnemental. Si les approches techniques sont spécifiques pour chaque catégorie de bâtiment, il en est de même pour la mise en œuvre. Les bâtiments d’élevage et de stockage représentent une activité très atomisée pour des centaines de petits charpentiers, alors que les bâtiments du type poulaillers et porcheries sont livrés « clefs en main » par une dizaine de fabricants (Deniau, Serupa, Dugué…), implantés dans l’ouest de l’Hexagone.
Qualité architecturale et confort de l’animal
Chaque année, 10 millions de m2 de bâtiments agricoles sont mis en œuvre, soit 35 % des constructions non-résidentielles. Par leurs matériaux, leurs styles et leurs implantations, ces ouvrages conditionnent l’aspect d’un site. L’exploitant doit y intégrer de nombreuses contraintes zootechniques, architecturales, réglementaires, économiques et environnementales et le recours à un architecte est obligatoire pour toute construction supérieure à 800 m2. Ces seuils s’appliquent également pour toute modification de volume de constructions existantes. La priorité du partenariat entre l’architecte (et/ou le technicien d’élevage) et l’exploitant est de construire un bâtiment fonctionnel et économique, cohérent avec le projet d’exploitation. « Il faut tenir compte d’une architecture dominante et affiner les propositions en fonction du lieu. Par exemple, en montagne, ne pas faire d’avant-toit donne un aspect plus industriel. Dans le cas de façades très longues, nous proposons une réflexion sur les bardages, sur leur couleur. Nous n’intervenons pas sur la technique intérieure, mais nous pouvons conseiller. Autre exemple, pour une grange, nous préconisons le bois, car le foin endommage, par poussées, les bardages métalliques », précise Daniel Masson, architecte et conseiller en architecture pour le Caue de la Haute-Savoie. La santé et le confort des animaux, la pérennité des fourrages stockés… dépendent de la cohérence entre l’aménagement intérieur et la structure du bâtiment.
Premier critère : une bonne ventilation
Dans une étable, les animaux saturent l’air très rapidement. Une brebis ou une chèvre éliminent deux à trois litres d’eau par jour sous forme de vapeur et une vache près de vingt cinq litres. Il est nécessaire d’aérer suffisamment le bâtiment en évitant courants d’air et condensations. La première qualité que doit posséder un bâtiment d’élevage est une bonne ventilation, et donc une meilleure maîtrise des agents infectieux. Aire de vie, volume d’air, température, humidité ambiante, ouvertures et nombre de têtes du troupeau : tous ces critères doivent être pris en compte afin d’installer des circuits performants assurant un renouvellement d’air suffisant.
Le choix de la ventilation se fait en fonction du type de bâtiment, de l’exposition du site et de l’altitude : la ventilation statique conjugue l’effet du vent et l’effet cheminée avec une arrivée d’air latérale en longs pans des façades et une sortie d’air au faîtage. Quant à la ventilation dynamique, elle est assurée par un extracteur d’air, un régulateur de débit et une sonde de température. Quel que soit le procédé utilisé, les claires-voies et les filets brise-vents facilitent également l’aération du bâtiment. Les couvertures en fibres-ciment sont majoritaires sur les bâtiments agricoles, particulièrement dans les bâtiments d’élevage sensibles aux problèmes de condensation. Assurant la fonction de régulateur de condensation, elles sont également prescrites pour leur faible entretien, leur résistance à la corrosion, et leurs possibilités esthétiques (teintes, formes, aspect). Néanmoins, ce matériau doit être bien ventilé. Eternit a eu l’idée de réactualiser la technique de la toiture en écailles qui offre une ventilation suffisante dans les bâtiments de grande largeur ou accolés. Le principe consiste à surélever une partie ou l’ensemble des plaques ondulées, grâce à un liteau en bois ou en métal, positionné en arrière des fixations.
Des habillages diversifiés en façades
Chaque projet prend en compte l’exposition du bâtiment, sa longueur et sa configuration (bâtiments isolés/accolés, extension/agrandissement de bâtiments existants, etc.). La meilleure conception se fait grâce à l’expérience et sur recommandation des techniciens d’élevage, des conseillers des chambres d’agriculture, et d’autres organismes professionnels. Économique, le bac acier reste présent en bâtiments de stockage, et d’élevage lorsqu’il peut être associé à une sous-face permettant de réguler la condensation.
Les bardages en bois et/ou bac acier recouvrent la quasi-totalité des façades des bâtiments non isolés. Là encore, le bois est souvent plébiscité, particulièrement en stabulations où il permet de réaliser des façades ajourées (planches de bois posées à claire-voie) assurant une ventilation correcte du local. De plus, le bois s’intègre mieux dans certains espaces sensibles, et il est économiquement plus intéressant que les bacs acier (voir encadré). L’épicéa, le douglas et le pin sylvestre sont les essences les plus couramment employées. Néanmoins, l’entretien représente une contrainte (excepté dans le cas de bois autoclavé). En effet, ces bardages nécessitent l’application régulière d’une lasure qui varie selon l’essence, l’exposition et l’usage. Certains fabricants de produits en fibres-ciment (Eternit, James Hardie) proposent des clins conçus pour l’habitat, dont l’aspect rappelle le bois et qui ne nécessitent aucun entretien. Si, techniquement, ces systèmes sont compatibles avec un usage agricole, leur coût est trop élevé pour espérer des débouchés importants dans cette filière. Ils peuvent constituer une bonne solution pour le bardage des murs extérieurs de certains locaux techniques associés, comme la salle de traite en stabulation. Les panneaux plans ou les plaques ondulées en fibres-ciment peuvent être utilisées en bardage pour assurer une continuité avec la couverture.
Lorsque le bâtiment doit être isolé (poulaillers, porcheries…), deux solutions existent : l’une traditionnelle, avec une peau extérieure, un panneau isolant toujours constitué de mousses plastiques (PSE, PU…) et une protection intérieure ; l’autre en panneaux sandwich assurant les trois fonctions. Ces panneaux reçoivent des parements métalliques, de fibres-ciment, voire de PVC pour certaines applications présentant de fortes contraintes d’hygiène. Des fabricants comme Terreal – Guiraud dans le Sud-Ouest – proposent des systèmes constructifs à base d’éléments en terre cuite (brique hauteur d’étage). Ces procédés sont adaptés aux porcheries et aux poulaillers par leur résistance dans un environnement difficile, leur absence d’entretien et leurs performances d’isolation et d’inertie thermique.