La comparaison des consommations de ce bâtiment R+1 en région parisienne sur trois années avant sa végétalisation et trois années plus tard, relève un gain de 20 %.
© Philippe Peiger
Les toitures végétalisées participent du confort thermique et de la baisse des consommations énergétiques d'un bâtiment. Reste que travailler le vivant requiert des compétences botaniques.
Si la toiture végétalisée améliore le confort thermique en faisant écran au rayonnement direct du soleil sur les matériaux de couverture ou d'étanchéité, les mesures exactes des bénéfices directs sont variables pour le bâtiment.
« Nous travaillons sur des matériaux vivants rendant presque impossible le calcul du coefficient d ' isolation R à l ' intérieur du bâtiment pour une toiture végétalisée extérieure, constate Philippe Peiger, agro-écologue et président de l'association Naturentoit. La végétation, l ' humidité, la pluviométrie, la température… tout entre en compte et change selon les saisons. » À titre d'exemple, si une toiture de type prairie, avec des graminées atteignant une hauteur de 30 cm durant l'été, apporte un bénéfice thermique intéressant, en hiver, cette même végétation réduite à quelques centimètres sera beaucoup moins efficace. À l'inverse, des petits arbustes de type crassulacées seront plus efficaces l'hiver que l'été.
La toiture de la résidence hôtelière du campus international thecamp, à Aix-en-Provence (13), qui vient d'être livré, met en œuvre un système de végétalisation semi-extensive.
Des gains de 20 % sur les consommations
L'impact sur les consommations énergétiques est, lui, plus facile à calculer. Les études réalisées, en plaine ou en montagne, sur des bâtiments avant et après la végétalisation de leur toiture relèvent un niveau d'économie de dépense énergétique aux alentours de 20 %, voire légèrement supérieur dans les régions plus chaudes l'été. Les calculs à l'échelle de l'îlot thermique de l'immeuble (l'environnement proche dans un rayon de 50 à 100 m) et de la ville sont également significatifs.
Bâle, la ville la plus verte du monde, avec près de 30 % de toits verts, et, depuis 2001, l'obligation de végétaliser toutes les toitures plates, « non utilisées » démontre que végétaliser environ 10 % des toitures de la ville diminue de 2 à 3 °C la température estivale. Cela favorise également l'isolation acoustique, car les bruits d'impact (pluie ou grêle) sont supprimés et les bruits aériens atténués (3 à 5 dB), la qualité de l'air (séquestration du carbone, des particules fines), la gestion des eaux pluviales (70 à 80 % par absorption et évaporation (substrat) ou évapo-respiration (plantes) et, enfin, la longévité du système d'étanchéité (multipliée par deux, voire plus). Accessoirement, la végétalisation contribuerait à la diminution du vandalisme et à l'augmentation de la valeur foncière.
Le végétal, élément clé de la frugalité
Dans tous les cas, le choix de la flore et les épaisseurs des substrats sont vitaux pour limiter l'entretien et l'irrigation et garantir ainsi la pérennité de la toiture végétalisée.
« Il faut absolument rechercher les solutions s'approchant le plus possible des milieux naturels comparables, tout particulièrement sur les bâtiments tertiaires et commerciaux où, compte tenu des surfaces, l' installation de systèmes demandant un arrosage régulier est difficilement soutenable en termes de développement durable, insiste Philippe Peiger. Si les normes suisses ou autrichiennes les plus qualitatives préconisent un minimum de 10 cm de substrat avec 20 à 50 variétés de plantes différentes, l'idéal est une épaisseur de 10 à 25 cm avec des compositions différentes pour cette végétalisation biodiverse des toits, mixant des matières organiques, issues de recyclage et minérales et du vivant, tels des nématodes, des insectes, des champignons ou des bactéries. » Accompagnant cette nouvelle vision, la loi sur la biodiverer mars 2017, intègre l'obligation de végétaliser en partie les toitures des bâtiments de commerce et les parkings. Un premier pas, la meilleure formule étant, pour beaucoup d'experts, des toitures bio-solaires capables de gérer le végétal, l'eau et la production d'énergie renouvelable. Une approche d'ingénierie écologique transversale qui ne peut que se développer face aux enjeux de la ville de demain.