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Quatre fois plus de communes concernées

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Quatre fois plus de communes concernées

Déjà largement connue, la réglementation sismique pour les bâtiments, basée sur l’utilisation de l’Eurocode 8 et de son annexe nationale, a été publiée le 22 octobre dernier.

Dix familles constituent les Eurocodes. La partie Résistance aux séismes du calcul des structures est définie par l’Eurocode 8, publié par l’Union européenne dès 1998. Ses annexes nationales françaises, qui viennent préciser certains paramétrages, étaient entièrement publiées début 2008. Il restait au gouvernement à rendre obligatoire l’utilisation de cette nouvelle norme.

C’est chose faite depuis la publication au Journal officiel du 24 octobre 2010, de deux décrets en date du 22 octobre, l’un relatif à la prévention du risque sismique, l’autre portant délimitation des zones de sismicité du territoire français, ainsi que d’un arrêté relatif à la classification et aux règles de construction parasismique applicables aux bâtiments de la classe dite « à risque normal ».
L’application de cette nouvelle réglementation est provisoirement volontaire et ne deviendra obligatoire qu’à partir du 1 er  mai 2011. L’UE a prévu un maximum de trois ans pour la période transitoire de coexistence entre les anciennes normes et les nouvelles. En France, la cohabitation avec l’ancienne réglementation PS92/2004 est prévue jusqu’au 31 octobre 2012 pour les projets dont les demandes de permis de construire auront été déposées après le 1 er  mai 2011. Dans ce cas, l’ancienne réglementation pourra encore être utilisée, mais en appliquant les valeurs d’accélération données dans l’arrêté du 22 octobre.
Le nombre de communes concernées par la réglementation sismique passerait ainsi de 5 000 à environ 20 000. Le calcul sismique devient ainsi obligatoire dans des régions à sismicité faible, où les bureaux d’études n’avaient pas développé de compétences. Deux raisons majeures expliquent cette évolution notable.
La première est le changement de l’approche de la sécurité qui est passée d’empirico-statistique avec un zonage établi dans les années 80 avec PS92, à probabiliste avec les Eurocodes qui exploitent une quarantaine d’années d’enregistrements sismiques. Auparavant, l’analyse était historique et se fondait sur les principaux séismes connus. La nouvelle approche intègre en plus la fréquence d’occurrence des séismes, en calculant le niveau de l’événement sismique dont l’occurrence est supérieure à 10 % sur une échéance de cinquante ans. Cela oblige parfois à prendre en compte un niveau de séisme supérieur à ce qui est recensé dans les archives des historiens.
Le second changement majeur résulte des retours d’expérience des nombreux séismes survenus ces vingt dernières années dans le monde. La nature du sous-sol est mieux prise en compte avec l’introduction du coefficient S (paramètre de sol) dans l’Eurocode. Résultat : le risque sismique est diminué sur les bons sols, comme les sols rocheux (granitiques en particulier), alors que les mauvais sols (meubles) sont pénalisés. Quant aux ouvrages dits « à risque spécial », comme les barrages, centrales nucléaires ou les installations classées (pétrochimiques par exemple), l’étude des risques est déterministe, avec une analyse scientifique très localisée du sous-sol sur lequel sont bâtis ces ouvrages.

Des bâtiments neufs classés selon leur vulnérabilité

La réglementation concerne les ouvrages dits « à risque normal », c’est-à-dire ceux pour lesquels les conséquences d’un séisme sont circonscrites à leurs occupants et à leur voisinage immédiat. Les classes de bâtiments ont été remplacées par des catégories. Ainsi, les classes A, B, C et D, allant de la moins vulnérable à la plus vulnérable, ont été rebaptisées respectivement catégories d’importance I, II, III et IV.
• La catégorie I comprend les bâtiments sans occupants sur la durée, tels que les hangars agricoles ;
• la catégorie II englobe les habitations individuelles, les parcs collectifs de stationnement, ainsi que les immeubles de bureaux et collectifs d’habitation, mais uniquement ceux dont la hauteur est inférieure à 28 mètres ;
• en catégorie III ce sont, entre autres, les immeubles de plus de 28 mètres de hauteur, ainsi que les établissements scolaires ;
• enfin, les bâtiments, les équipements et les installations classés en catégorie IV, sont ceux dont le fonctionnement est primordial pour la sécurité civile, pour la défense ou pour le maintien de l’ordre public, comme les centres de secours, les hôpitaux ou les centres vitaux de télécommunications.
Pour ces quatre catégories, la réglementation EC8 indique des valeurs qui viennent majorer les accélérations de mouvement du sol en fonction de l’importance des bâtiments, respectivement 0,8 - 1 - 1,2 et 1,4. Dans l’ancienne réglementation PS92, ces majorations étaient implicites.
Les exigences réglementaires s’appliquent par zones de sismicité et par catégories de bâtiments. Aucune exigence n’est demandée pour les bâtiments de catégorie I quelle que soit la zone, ni pour la zone 1 (très faible).
Ces nouvelles règles parasismiques s’appliquent lors de la construction de bâtis nouveaux, à la construction de bâtiments neufs de catégories d’importances III et IV dans la zone de sismicité 2 et à la construction de bâtiments nouveaux de catégories d’importances II, III et IV dans les zones de sismicité 3, 4 et 5.
Même après cette période transitoire, l’arrêté précise que certaines règles continueront de prévaloir sur l’EC8 sous certaines conditions, en particulier PSMI 89-rév 92 pour les maisons individuelles en zones 3 et 4 qui répondent à certains critères. Dans le cadre contraire EC8 est appliqué.
De même, en zone 5 aux Antilles, pour la catégorie II, le guide CPMI « Construction parasismique des maisons individuelles aux Antilles » rédigé par l’Association française parasismique (AFPS) est appliqué si les critères du guide sont remplis, sinon la référence demeure EC8.

Des exigences pour les travaux sur le bâti existant

La nouvelle réglementation s’applique aussi dans certaines conditions aux bâtiments existants, notamment à l’occasion de travaux importants.
Une source de conflits potentiels se trouve dans une précision d’apparence anodine de l’arrêté, qui précise que « les travaux sur existant ne doivent pas aggraver la vulnérabilité au séisme ». Une première catégorie de travaux dits « importants » est définie par l’augmentation ou la diminution de plus de 30 % de la Shon initiale d’un plancher.
• Aucune exigence n’est demandée en zone 1, quel que soit le bâtiment, ni pour un bâtiment de catégorie I, quelle que soit la zone.
• En zone de sismicité 2 (faible), l’exigence ne concerne que la catégorie IV, pour laquelle on applique une modulation à 60 % des valeurs des accélérations.
• Idem, en zones 3 et 4, une modulation à 60 % est appliquée aux catégories III et IV. Dans ces zones, pour la catégorie II répondant aux bons critères, PSMI est appliqué avec un niveau de séisme directement inférieur (ceux de la zone 2 pour un bâtiment en zone 3 par exemple). Si les critères PSMI ne s’appliquent pas, EC8 est appliqué avec une modulation de 60 % des accélérations.
• En zone 5, qui concerne les Antilles, les mêmes types de dispositions réglementaires existent uniquement pour les zones 3 et 4, mais avec le guide CPMI.
D’autres travaux lourds sont prévus par la réglementation, comme la suppression de plus de 20 % du contreventement vertical (murs ou palées de stabilité des forces latérales), ou la mise en place d’éléments lourds en toiture. Dans ces situations, les modulations EC8 à 60 % sont à appliquer en zones 4 et 5. En cas de travaux visant uniquement à renforcer le niveau parasismique d’un bâtiment, il est précisé que « le niveau de dimensionnement de ce renforcement relève du choix du maître d’ouvrage ». Cela peut conduire à des modifications ou des renforcements de bâtiments publics existants, comme les hôpitaux ou les usines spéciales (importances III et IV).

Une profession qui s’organise

Plus complexes à mettre en œuvre que l’ancienne réglementation, les Eurocodes sont aussi plus ardus à lire, car nombre d’explications et de convolutions viennent perturber la compréhension du protocole. Aussi, les éditeurs de logiciels de codes de calculs structures s’organisent pour répondre aux bureaux d’études qui souhaitent comprendre les paramètres et leur influence. Ainsi, tient à souligner Manuel Liedot, directeur Marketing produits pour Graitec, « Grâce au Cstb, nous étions prêts depuis deux ans pour l’intégration de l’Eurocode 8 avec zonage dans notre produit. C’est un socle, mais chaque pays d’Europe a ses annexes, qui portent parfois sur des variantes importantes ». D’une façon générale, complète Cyril Heck, responsable régional des ventes chez Scia, « Un grand nombre de nos clients travaillent actuellement avec l’Eurocode 8, par exemple en Belgique et en Autriche, où il s’agit déjà de la norme de référence. En France, ce sont surtout les projets d’envergure. Les fonctionnalités actuelles de Scia Engineer pour l’EC8 concernent la partie “ chargement ” (combinaisons de charges spécifiques, spectres sismiques) et la partie calculs (analyse par superposition modale). Pour les versions futures, nous allons aussi développer les aspects de vérification spécifique, notamment en partenariat avec des spécialistes grecs (la Grèce, pays à très haut risque sismique) ».

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