© Jonas Tophoven
La charpente de Notre Dame a-t-elle rempli sa fonction de stabilité au feu ? Les charpentes très anciennes sont-elles plus sujettes à des embrasements que d'autres ouvrages ? Le point avec Gaëtan Genès du bureau d'études ECSB.
L’incendie spectaculaire de la cathédrale Notre-Dame se solde en premier lieu par la destruction totale de la toiture et de la flèche de l’édifice, et donc d’une charpente vieille de 850 ans qui comportait des bois de chêne millénaires. C’est aussi au niveau de la charpente que le feu semble s’être déclenché, de sorte que cet ouvrage apparaît comme un maillon faible. Gaëtan Genès ne le voit pas ainsi. Dirigeant le bureau d'études ECSB (Etude charpente et structure bois), membre de la Société des experts bois, il est aussi le référent patrimoine au sein de l'association Ingénierie Bois Construction. Selon lui, la charpente a bien rempli ses fonctions lors de l’incendie du 15 avril : « malgré une propagation spectaculaire liée au vent et à l’appel d’air que génèrent des incendies de ce type lorsqu’ils ne sont pas circonscrit rapidement, la charpente de la cathédrale a rempli sa fonction de stabilité au feu, puisque les premiers effondrements de charpente ont eu lieu plus d’une heure après la détection de l’incendie. Ce délai a permis d’évacuer et de sécuriser l’ensemble du public, ce qui est l’objectif premier en sécurité incendie ». L’intervention rapide des pompiers et la tenue au feu des charpentes bois ont permis de sauvegarder la plupart des structures maçonnées et une partie des biens de la cathédrale, ce qui, selon Gaëtan Genès, n’aurait pas forcément été le cas avec d’autres matériaux.
Les charpentes très anciennes sont-elles plus sujettes à des embrasements que d'autres ouvrages, notamment en bois ? Là encore, Gaëtan Genès est affirmatif : « A ma connaissance, aucune étude statistique ne met en évidence un risque incendie plus important sur les bâtiments anciens. Dans le cas d’un entretien régulier des combles, il n’y a pas de risque majoré de départ de feu, même si le bois est abondant et dit « sec », avec une hygrométrie résiduelle aux alentours de 12 %. La cause des sinistres, de manière identique à ce qui est rencontré pour des constructions neuves, est souvent électrique, ou liée à des travaux de couverture ou générant des sources de chaleur. Par contre, la difficulté principale d’intervention sur de tels ouvrages est liée à leur situation en milieu urbain dense et à leurs dimensions hors normes ».
Reconstruire en respectant sa facture initiale ?
Selon l’expert, le matériau bois n’est pas à incriminer en tant que tel. Mais un bilan s’avère primordial, suite à ce désastre du 15 avril, pour en tirer les conséquences : « A l’heure actuelle, tous les moyens techniques, les protocoles, la logistique, la formation, les systèmes de prévention incendie existent, mais doivent être coordonnés dans l’intérêt de la sauvegarde de notre patrimoine ». Toutefois, Gaëtan Genès insiste sur l’opportunité de reconstruire la charpente de la cathédrale en respectant sa facture initiale pour sauvegarder sa valeur patrimoniale : « Nous savons précisément comment elle était bâtie. La filière bois dispose de la matière première, le chêne, et surtout du savoir-faire unique d’entreprises françaises spécialisées en patrimoine ancien, des Architectes en Chef des Monuments Historiques, accompagnés des services de l’état compétents en patrimoine ».