Destiné à accueillir dès 2004 le musée de Bretagne, la bibliothèque centrale et le centre culturel des Sciences et techniques industrielles, l’ouvrage conçu par Christian de Portzamparc sépare ses fonctions dans des volumes très marqués, mariant plastique et techniques innovantes.
Dans un quartier en pleine mutation, situé autour de la gare, le NEC (Nouvel équipement culturel) de Rennes, s’impose visuellement et techniquement. Sur un site difficile (terrain de remblais anciens, de sables et d’argiles, présence d’une nappe phréatique peu profonde et du tunnel du VAL), il était nécessaire de réaliser un sérieux confortement. Ce dernier se compose d’un soutènement périphérique avec 350 pieux d’un diamètre de 0,60 m et distants de 1,20 m. D’une hauteur variant de 8 à 11 m, ces renforts sont soit autostables, soit tirantés. L’ensemble se complète d’un radier monolithique d’une épaisseur variable de 0,60 à 1,40 m, capable de supporter une sous-pression de 5 m d’eau. Selon les zones, il est autostable ou ancré par micropieux, un contre-voile en béton coffré sur une seule face ayant été mis en œuvre par la suite sur toute la périphérie de l’ouvrage. De plus, la proximité de la nappe a conduit les concepteurs à imaginer un cuvelage particulier pour les zones de réserve de la bibliothèque et du musée. Il s’agit d’une sorte de « boîte dans la boîte », comprenant un second dallage en béton de 15 cm d’épaisseur, qui participe à la lutte contre la poussée de l’eau, de murs périphériques en parpaings et d’un réseau de drainage sur la totalité de la zone traitée.
Un parti architectural complexe
Cette solution a été préférée à la méthode du cuvelage étanche, aussi coûteuse, et jugée potentiellement moins fiable dans le temps. Par sa géométrie, les matériaux utilisés, mais aussi du fait de son implantation, le NEC est un ouvrage complexe, constitué de quatre bâtiments autonomes en forme et en fonction : le musée, le bâtiment administratif, la bibliothèque et l’espace des sciences.
Avec un socle monolithique en béton armé de trois niveaux, le musée est habillé de panneaux en béton structuré, qui rappellent, par leur teinte et leur texture, le granit rose de Bretagne. De dimensions variables, ils ont tous demandé une étude particulière. Les différents éléments, dont la teinte est obtenue par les agrégats utilisés, pèsent jusqu’à 7 tonnes et sont rendus solidaires du gros œuvre par l’intermédiaire de rails Halphen (voir encadré p. 27), ainsi que de corbeaux d’appui en béton.
Plus discret et volontairement en retrait, le bâtiment administratif est constitué d’une structure mixte béton/métal, recouverte d’un ensemble continu de bardages et de couvertures en zinc. Cette structure est basée sur des portiques métalliques portant sur les poteaux de façade, et suspendus à une poutre en comble. Ce choix diminue les sections des poutres en partie centrale, et facilite ainsi les passages de réseaux en circulation. Enfin, le contreventement est assuré par deux noyaux techniques en béton comprenant les escaliers et gaines d’ascenseurs, les planchers étant réalisés en bacs collaborants.
Béton projeté, voiles en dévers, structures mixtes acier/béton, etc. constituent la bibliothèque et le musée, tandis que le dôme de l’espace des sciences (futur planétarium) a nécessité une demande d’Atex (1) de la part de GTB, l’entreprise titulaire du lot gros œuvre, étanchéité et couverture.
Sept niveaux de vitrages en dévers
La bibliothèque, une pyramide inversée à structure mixte béton/métal, domine de ses sept niveaux l’ensemble du complexe. Elle se présente comme un prisme avec une structure acier/béton recouvert, côté béton, d’éléments en aluminium, et, côté acier, de façades entièrement vitrées. Des voiles de 30 cm d’épaisseur couvrent les 1 000 m2 de sa surface. Ils sont réalisés en béton B 35, inclinés de 17° par rapport à la verticale et coulés en place à l’aide de coffrages semi-grimpants Doka. L’ossature secondaire qui supporte les vitrages est déportée de 120 mm par rapport à la structure porteuse, un traitement à la jonction façade/plancher rend ce dernier coupe feu 1 h 30. Elle est composée d’un ensemble menuisé filant sur la hauteur devant les poteaux, et fixée ponctuellement sur ceux-ci, des éclissages autorisant l’absorption de dilatations différentielles entre les ossatures primaire et secondaire.
Prévues à l’origine comme d’immenses vitrages extérieurs collés, les parties vitrées ont été ramenées à des ouvrages de 3 x 0,75 m, posés à bords libres et tenus mécaniquement en périphérie. Cette évolution est liée à des craintes pour la résistance dans le temps (avec les toutes les conséquences que pourrait engendrer une chute de vitrages inclinés de grande taille), de simplification de la maintenance, et de limitation des coûts en cas de remplacement d’un élément. Les vitrages, à bords libres horizontaux, sont au nombre de 12 par module, ceux des deux premiers rangs intègrent une fonction supplémentaire de garde-corps. Enfin, des panneaux opaques, posés et fonctionnant comme les vitrages, sont également mis en œuvre au droit de tous les nez de dalles.
Une peau en écailles de zinc
Le cône en béton projeté de l’espace des sciences est totalement revêtu d’écailles de zinc. Cet ouvrage ne renvoie à aucune figure géométrique simple. À commencer par l’impossibilité (du moins économique) d’utiliser un système de coffrage. Dans un premier temps, l’entreprise GTB a réalisé un élément de cône en taille réelle, afin de valider le principe envisagé : couler les planchers constitués de prédalles avant les voiles, afin de les utiliser comme gabarits (voir encadré p. 28).
L’ouvrage en tronc de cône est réalisé en béton B 25, projeté sur une armature et une peau intermédiaire en métal déployé. La peau extérieure, constituée d’écailles de zinc losangées clouées sur un voligeage, est composée de l’intérieur vers l’extérieur d’un pare-vapeur positionné sur la face externe de la paroi béton, d’une laine de roche classée M0 de 55 mm d’épaisseur, et d’un revêtement d’étanchéité constitué d’une membrane PVC fixée mécaniquement (Sika Plan 12 G). Les voliges (doubles) qui supportent les écailles de zinc sont fixées sur des profils oméga en tôle galvanisée, et chevillés dans la paroi béton. Le dôme qui finit l’ouvrage n’est pas en reste de complexité. Il est réalisé à l’aide d’un béton projeté sous une membrane polyester enduite de PVC et maintenue en surpression par des ventilateurs : il en découle sa forme de demi-sphère. Enfin, l’ensemble est revêtu de 16 000 écailles de zinc losangées, avec des largeurs d’éléments différentes pour chaque rang, du fait même de la forme du dôme (voir encadré p. 30).
Une solution finalement logique
La mise en œuvre du dôme paraît compliquée, mais le choix se justifie par les problèmes qui auraient découlé des autres possibilités : la solution du béton coulé en place était techniquement possible, mais plus coûteuse et trop longue ; installer des éléments préfabriqués nécessitait trop de petits éléments, pour des raisons de limite de poids au niveau des grues à tour, la portée, combinée au poids, étant également trop importante pour envisager l’emploi d’une grue mobile, même très puissante ; utiliser du béton projeté était difficile en termes de délai, de gabarits avec une procédure complexe. Enfin, s’orienter vers un dôme polyester était incompatible avec les contraintes feu et acoustique
Au final, comme le précise Jean Noël Tirel, le responsable de la production, « la technique qui a été utilisée, et même si elle paraît complexe, a déjà été mise en œuvre pour la partie structure de nombreuses fois et a prouvé sa fiabilité »