Interview

Les nouvelles pratiques constructives

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Les nouvelles pratiques constructives

Dans les petites communes, édifier un restaurant non-inséré à un groupe scolaire, permet de mutualiser et d’optimiser la construction. Ainsi, le restaurant scolaire, bâti en 2011 à La Ménitré (49), permet de servir 190 repas à l’école maternelle jouxtant le projet et aux écoles primaires situées non loin. (Doc. CAUE Maine-et-Loire.)

JÉRÔME DEZOBRY est directeur adjoint à la Direction générale de l’aménagement durable du conseil général du Nord. Le département du Nord gère un parc de 200 collèges dont vingt-deux sont des opérations certifiées HQE (treize en phase de réalisation), ce qui en fait le premier maître d’ouvrage de France en terme de certification de bâtiments d’enseignement.

Certification hqe

À l’heure des bâtiments BBC, les établissements scolaires se caractérisent par de nouvelles exigences de construction. Comment celles-ci s’expriment-elles ?

J.D. : Ayant à charge la construction et l’entretien des collèges, à la suite du transfert des compétences de l’État vers les collectivités territoriales, le conseil général du Nord s’est engagé dès 2006 dans une politique de développement durable qui s’est traduite par la généralisation de la certification HQE sur l’ensemble de ses bâtiments neufs (collèges et bâtiments tertiaires). Treize collèges neufs sont aujourd’hui certifiés. Bien que chaque collège soit un projet à part entière, plusieurs cibles techniques ont été privilégiées, parmi lesquelles figure la gestion de l’énergie, avec un traitement systématique en TP (Très Performant) pour les opérations soumises à la RT 2005 et en P (Performant) pour les opérations soumises à la RT 2012 (1) , et la gestion de l’eau, avec des systèmes de récupération des eaux pluviales pour l’alimentation des WC, le nettoyage des locaux, ou l’arrosage des espaces verts, et la mise en œuvre de techniques alternatives d’assainissement telles que les toitures végétalisées... Dans l’environnement intérieur, nous avons favorisé l’utilisation de lumière naturelle pour l’éclairage des locaux, la ventilation mécanique double flux permettant la récupération des calories sur l’air extrait, ou encore le tri sélectif tant dans les classes, les bureaux, que la demi-pension. Pour autant, la Haute qualité environnementale ne se joue pas uniquement sur des dispositions techniques, mais également sur des comportements. C’est pourquoi un aspect important des projets a consisté à sensibiliser les utilisateurs, et notamment les élèves, aux particularités de leur nouvel environnement. Que cela soit par la mise en place de panneaux explicatifs à l’entrée du collège, dans les couloirs, par des réunions d’information, ou encore par la distribution de clés USB traitant du bâti et des moyens de contribuer à son bon fonctionnement.
Cette démarche est, en outre, associée à une volonté politique forte d’intégration du collège dans la ville, ce qui en fait un vrai projet d’établissement scolaire du xxi e siècle. Un enga- gement qui conduit à l’acquisition du foncier sur toutes les opérations neuves et à une attention particulière quant au traitement du parvis de l’établissement par les architectes. Celui-ci se devant d’être un lieu accueillant faisant le lien entre la ville et le collège.

ÉNERGIE

Quelles solutions sont privilégiées pour maîtriser les consommations ?

J.D. : Dans les projets de construction, la gestion de l’énergie induit une réflexion sur l’orientation des bâtiments, le choix d’un éclairage basse consommation asservi à l’éclairage naturel, le recours aux énergies renouvelables (installation de panneaux solaires thermiques pour l’ECS des demi- pensions, modules photovoltaïques, puits canadiens ou géothermie), ainsi qu’une gestion technique des bâtiments. Dans les collèges existants, le plan de maîtrise de l’énergie prévoit le remplacement des menuiseries extérieures avec du double vitrage, le changement ou la rénovation des équipements de chauffage, et des travaux lourds d’isolation en même temps que le traitement esthétique des façades.
Par ailleurs, depuis 2011, tous les collèges du département font l’objet d’un suivi et d’une optimisation au quotidien et en temps réel de leurs consommations de fluides (eau, gaz, électricité et chauffage urbain, énergies renouvelables). Le système fonctionne par télérelève de chaque compteur, collège par collège, et de plus en plus, avec des compteurs décentralisés permettant d’isoler les consommations des différents équipements (demi-pension, gymnase, bureaux...). Sa gestion est assurée à l’échelle d’unité territoriale par des économes de flux, chaque économe ayant à sa charge un parc de 20 collèges, et l’ensemble des données est regroupé sur une plate-forme située à Lille. Il est également consultable par les utilisateurs. En permettant une véritable chasse au gaspillage, avec la détection des fuites d’eau et des défauts de chauffage, et un temps de réaction rapide, ce système autorise jusqu’à 20 % d’économie sur les consommations. Nous réfléchissons actuellement à la mise en place d’alertes par SMS ou par mail, afin de réduire le temps de prise en charge des défauts.

ACCESSIBILITÉ

Qu’en est-il de l’accès des PMR aux établissements scolaires ?

J.D. : L’accessibilité des collèges à tous les handicaps représente pour toute collectivité un véritable défi et une grande interrogation. La priorité consiste à être conforme à la loi le plus rapidement possible, même si l’échéance de 2015 paraît extrêmement difficile à tenir. Aujourd’hui, tous nos collèges neufs et nos établissements réhabilités respectent la norme, mais il nous reste encore un parc important à traiter. Face à cet enjeu, nous sommes en contact avec de nombreux départements et réfléchissons ensemble à des alternatives prenant notamment en compte le transport des élèves en situation de handicap, ce qui relève d’ailleurs de l’une de nos missions. Nous avons l’exemple du conseil général de l’Essonne qui s’est fixé comme objectif que tout collégien soit dans un rayon de vingt minutes au plus d’un collège accessible par n’importe quel type de transport.

NOUVELLES TECHNOLOGIES

Comment répondre aux nouveaux besoins pédagogiques des établissements scolaires ?

J.D. : Nous développons le projet de collège numérique qui est la poursuite du projet de collège ouvert et de bâtiment HQE. Sa réalisation comporte trois volets : le premier d’entre eux consiste à câbler l’ensemble des établissements scolaires, à installer un ordinateur dans chaque salle et un minimum de huit tableaux blancs interactifs par collège, et à réaliser au moins deux « classes pupitres » par établissement.
La « classe pupitre », c’est la nouvelle salle informatique, qui permet aujourd’hui à chaque élève de disposer d’un ordinateur et sert en même temps de salle d’expérimentation ou de laboratoire selon les matières. Un appel à projets permet, en outre, de doter de matériels supplémentaires les collèges, dans le cadre d’une dotation spécifique qui s’ajoute au pack de base défini pour tous les collèges.
Le deuxième volet, c’est un raccordement haut débit de 8 mégas par seconde pour tous nos collèges, y compris ceux situés dans les zones les plus rurales. Le raccordement, dont le marché a été notifié début 2012 fait suite à un groupement de commandes avec le département du Pas-de-Calais et la Région Nord-Pas-de-Calais. Un rapprochement qui a permis de diviser par deux les coûts. Le dernier volet est la création d’un espace numérique de travail, accessible depuis le collège et la maison, pour lequel un appel d’offres a été lancé là aussi pour l’ensemble des collèges et lycées de la Région.

CONCEPTION

Des évolutions en terme de programmation sont-elles prévues ?

J.D. : Depuis les lois de décentralisation, nous nous trouvons à une étape charnière de nos investissements. La première phase de mise à jour technique est pratiquement achevée puisque 110 collèges ont été reconstruits depuis 1986, dont plus de cinquante de type Pailleron (seul un établissement reste à traiter) et, une nouvelle phase commence, également motivée par des contraintes techniques avec l’obligation d’accessibilité pour 2015, et le développement d’outils pédagogiques pouvant conduire au regroupement de plusieurs collèges. Le programme type de nos collèges est amené à évoluer pour servir de squelette aux futurs projets de construction et à s’adapter, en concertation avec les équipes pédagogiques, aux contraintes spécifiques de construction et d’exploitation. Il fait actuellement l’objet d’une évaluation par un cabinet extérieur.

Seuil

Existe-t-il un effectif optimal?

J.D. : En milieu urbain, il existe un optimum de 600 élèves qui tient compte de l’intérêt de l’enfant et reste raisonnable par rapport à la gestion technique du collège. Au-dessus de ce seuil, les établissements deviennent de grosses entités dans lesquelles le collégien est un peu perdu. En dessous, il n’y a pas la marche nécessaire qui permet à l’enfant d’évoluer, de passer de l’école primaire dans laquelle il est comme dans un cocon avec son professeur des écoles, et sa classe. Mais si ce nombre est adapté en milieu urbain, il doit être revu à la baisse en milieu rural où l’habitat dispersé conduit à des temps de transport plus élevés. Il faut veiller à ce que les enfants ne fassent pas une heure trente de route le matin pour se rendre à l’école et autant le soir pour rentrer...

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