Soumis aux exigences des nombreuses normes et réglementations en vigueur, le verre feuilleté répond aujourd’hui aux besoins de sécurité des personnes ou des biens, selon le domaine d’application.
De la simple étagère de salle de bains jusqu’au plancher du premier étage de la tour Eiffel récemment rénovée, en passant par les logements, les commerces et bâtiments tertiaires, les façades extérieures, les garde-corps et les cloisons intérieures… dans tous les domaines de l’architecture et de la décoration, l’utilisation du verre doit être conforme à des exigences de sécurité. Aussi ces produits sont-ils encadrés par de multiples normes.
Les verres de sécurité sont réalisés à partir de verres plats flottés, c’est-à-dire fabriqués par flottage du verre en fusion sur un lit de métal en fusion également pour donner une feuille d’une épaisseur uniforme et d’une surface très plane. Mais ce verre simple peut se casser facilement en éclats dentelés coupants. Pour lui conférer des qualités de sécurité, il doit subir une transformation thermique par trempage, ou être assemblé par feuilletage.
Le verre trempé est produit en soumettant le verre flotté à un traitement de chauffage et de refroidissement. Le matériau devient cinq?fois plus résistant que le verre ordinaire de même épaisseur. S’il reste facilement cassable par un impact brutal, il se brise alors en petits fragments non coupants et non tranchants. Ce type de vitrage, très courant en Allemagne, est peu employé seul en France, sauf comme un élément de feuilletage.
Le verre de sécurité feuilleté est destiné, lui, à être utilisé lorsqu’il existe des risques de dommages accidentels et qu’un verre monolithique présenterait un danger. Il peut être brisé localement après un impact, mais conservera son intégrité, sans générer d’éclats de verre.
Le recours au verre feuilleté est ancien pour les planchers et marches d’escalier, les glaces d’aquarium, les vitrages d’ascenseur, ou ceux associés à la protection et à la détection de l’intrusion grâce à son réseau de fils de cuivre pratiquement invisibles incorporés. Son application dans le domaine de l’enveloppe du bâtiment est plus récente?: la première grande réalisation en verre feuilleté en France est la pyramide du Louvre, à Paris.
Des verres feuilletés de sécurité pour tout type d’utilisation et de protection
«Verre feuilleté de sécurité?»?: le terme, générique, décrit un verre ne présentant pas, ou peu, de danger de blessure lorsqu’il se casse. Il n’est pas traversé lors d’un impact normal, et les bris sont maintenus en place. Conforme à la norme
Cas extrême?: pour résister au vandalisme, à l’effraction, aux tirs d’armes à feu, aux explosions et aux événements naturels exceptionnels, on utilise un verre blindé. Ce verre feuilleté assemble plusieurs feuilles de verre minéral et/ou organique (polycarbonate), associées par des films intercalaires (le plus souvent, en PVB).
Généralement, le verre de sécurité est formé de trois plis?: deux couches de verre prenant en sandwich une mince couche intercalaire en PVB. Les épaisseurs du verre et du PVB sont ajustées selon l’application.
L’un des verres peut être trempé, afin que le vitrage offre une excellente résistance aux contraintes thermiques et à l’incendie. Lorsque le verre feuilleté trois plis classique, même avec une stratification trempée ou un verre renforcé à la chaleur, ne fournit pas le niveau d’intégrité requis, le nombre de plis est augmenté. Il peut atteindre jusqu’à cinq plis et quatre intercalaires pour des écrans de sécurité pare-balles.
Le marché est segmenté selon l’utilisation du produit et le niveau de performance souhaité. Selon les cas, les verres de sécurité doivent assurer une protection renforcée contre les blessures, la chute des personnes ou d’objets, la défenestration, le vandalisme et l’effraction, le bruit, l’incendie, les flammes et les fumées, les tirs d’armes ou les explosions, le rayonnement solaire et les rayons ultraviolets.
Chaque type de protection est encadré par une norme. La norme
Par exemple, pour un garde-corps présentant un risque de chute d’éclats dans la rue, un verre feuilleté est obligatoire. Le choix du type de verre et de l’épaisseur dépendra des conditions d’installation et du lieu. Pour un montage avec un profil au sol, on utilisera un verre feuilleté trempé, généralement de 16?mm d’épaisseur. Pour un montage par pinces, le verre sera un feuilleté trempé. L’épaisseur dépendra de la taille des plaques et du lieu d’installation, en général entre 8 et 12?mm. Le verre feuilleté trempé présente une meilleure résistance au choc, à la flexion, ainsi qu’à la pression des pinces à verre. Il est également conseillé en cas d’installations extérieures exposées à des vents forts et pour des panneaux de grandes dimensions. Enfin, pour un montage avec un cadrage ou une feuillure, on pourra utiliser un verre feuilleté simple, dont l’épaisseur se situe entre 10?et 12?mm.
Aujourd’hui, le verre feuilleté est mis en œuvre dans des réalisations complexes. Pour le premier étage de la tour Eiffel, Saint-Gobain a ainsi fourni un plancher en dalles de verre antidérapant, qui rend le sol transparent sur une emprise de 1,85?m au plus large. L’entreprise a installé des garde-corps vitrés en périphérie de l’ouverture centrale de la tour. À 57?m de hauteur, la transparence du verre procure la sensation de marcher dans le vide, au-dessus de la structure en encorbellement du premier étage du monument. Pour réaliser cette surface de 128?m², Saint-Gobain a conçu 64?dalles obtenues par le collage de trois feuilles de verre avec deux films intercalaires à haute résistance. Le complexe totalise une épaisseur de 32?mm, qui lui assure une capacité portante de 500?kg/m². Afin que le sol ne soit pas glissant, tout en préservant au maximum la transparence du plancher, une sérigraphie de points émaillés (combinaison d’émaux verriers et d’abrasifs) a été appliquée en surface supérieure.
Par ailleurs, le verre feuilleté et une multitude de systèmes permettent la conception de façades, depuis le simple mur-rideau, jusqu’aux doubles peaux requérant une technologie très avancée. Malgré les contraintes de la réglementation thermique, la grande variété de combinaisons offerte laisse libre cours à la créativité des architectes. Qu’ils soient collés sur un cadre démontable (vitrage extérieur collé, VEC), agrafés sur une ossature au moyen de fixations mécaniques (vitrage extérieur attaché, VEA) ou pareclosé (vitrage extérieur, VEP), les panneaux de verre sont obligatoirement composites et de sécurité. En effet, selon les cas, ils doivent être résistants mécaniquement et stables, supporter les charges climatiques, garantir la sécurité en cas d’incendie, protéger du bruit, assurer une isolation thermique et éviter la chute d’éclats en cas de bris.
Fabricants | Produits | Destination | Épaisseur (mm) | Composition (1) | Classement (2) | Caractéristiques | Observations | Utilisation | |
AGC | Stratobel Security Bullet | Vitrage résistant aux attaques à l’arme à feu | 14 à 80 | VF | - | BR1 à BR7, SG1 et SG2 | Cradle to Cradle Certified Silver | Façade | |
Stratobel EVA Création | Vitrage de sécurité décoratif | 4 à 19 | Verre trempé + intercalaire en éthylène vinyle acétate (EVA) | 1B1 | - | Possibilité d’intégration dans la masse d’un matériau décoratif | Façade et intérieur bâtiment | ||
Stratophone | Vitrage de protection acoustique | 6 à 17 | VF | - | Rw= 35 à 41 dB | Réduction sonore jusqu’à 50 %, Cradle to Cradle Certified Silver | Façade | ||
Pyrobelite | Vitrages pare-flammes | 7 ou 11 | VF : glaces claires et intercalaires intumescents | - | PF 30 min. ou 1 h | Etanches aux flammes, gaz ou fumées et isolation thermique. | Intérieures ou extérieures | ||
CGI France | Pyroguard EW30 | Protection incendie | 7 | VF : 2 verres + 1 intercalaire en résine | EW30 3B3 Ug=5,1 W/(m².K) | CF 30 minutes | Découpable, stable aux UV, transmission lumineuse 87 % | Installation intérieure ou extérieure, sens du feu indifférent | |
Pyroguard T-EI60/25-3 | Vitrage coupe-feu | 25 | VF : 4 verres trempés de sécurité + 3 intercalaires en gel intumescent transparent | EI60 1B1 Ug=4,3 W/(m².K) | CF 1 h | Stable aux UV. Transmission lumineuse 73 % | Installation intérieure | ||
Smokeguard DHH30/8 EDC | Ecran de cantonnement | 8 | SV trempé de sécurité | DH30 Classe 1 aux chocs | - | Transmission lumineuse 87 %, perçages et encoches possibles, stable aux UV | Cantonnement des gaz chauds et des fumées | ||
Euroglass | Eurolamex Phon | Sécurité antibruit | - | 2 verres flottés + 1 film spécial acoustique transparent | - | - | Réduit le volume sonore de 3 dB | Utilisé en simple vitrage | |
Fireswiss Foam | Protection contre le feu et la fumée | - | VF : verres de sécurité + film | E | CF, PF 30 minutes | Protection UV par ajout d’une feuille spéciale | Environnements divers | ||
EVM Glass | Contraflam | Gamme de vitrages de protection incendie | 16 à 62 | SV/DV | EI | CF 30 min. à 2 h | - | - | |
Pilkington France | K Glass N | Vitrage isolant thermique à faible émissivité | 4, 6, 8 | SV trempé à couche pyrolithique | Ug=0,9 W/(m².K) | - | Peut être feuilleté, trempé thermiquement, bombé et sérigraphié | utilisé sous forme monolithique ou assemblé en DV isolant | |
Optilam | Protection contre l’effraction, les balles, le souffle | 6,8 à 19,5 | VF : 2 ou plusieurs verres + intercalaires PVB | Classe 1 | - | Protection conte les bruits et les rayons UV | Intérieure et extérieure | ||
Pyrostop | Protection feu et lutte contre la propagation des flammes, des fumées et des gaz chaud | - | VF : 2 ou plusieurs verres clairs + intercalaires intumescents | EI | CF jusqu’à 3 h | Bloque la transmission de la chaleur par conduction et rayonnante | Intérieure et extérieure | ||
Schott AG | Fireswiss | Protection contre incendie, fumées et rayonnement thermique | - | VF avec couche à transformation thermique | EI | - | Film UV pour application extérieure, combinable avec d’autres verres | Cloisonnement intérieur | |
Pyranova | Vitrages coupe-feu | 15 à 27 | VF : vitres de 3 mm et intercalaires en gel intumescents | EI | CF 30 min. ou 1 h | Le gel devient mousseux et opaque en cas d’incendie | Intérieures (sans film PVB) ou extérieures (avec film PVB) | ||
Pyran S | Verre de sécurité monolithique traité antireflet | 5 à 12 | Verre au borosilicate trempé | - | CF 30 minutes à 2 h | Isolation phonique de 30 à 34 dB Ug = 5,8 W/m².K | - | ||
SGG France | Stadip | Protection de risques de chutes de verre | 4 à 12 | VF : verres de 2 à 6 mm et 1 intercalaire en PVB | 2B2 | - | - | Vérandas, auvents, marquises… | |
Stadip Protect | Protection des risques de chutes de personnes dans le vide | 7 à 13 | VF : verres de 3 à 6 mm et au moins 2 intercalaires en PVB | 1B1, P1A à P4A, P5A à P8B | - | - | Allèges, garde-corps, cloisons, vitrages inclinés… | ||
Stadip Protect SP, HN, UJ, JH, BS | Protection renforcée contre le vandalisme, les tirs d’armes à feu, les déflagrations | 10 à 27, 13 à 85 | VF composé au cas par cas | P5A, P6B à P8B, BR1 à BR7, SG1 à SG2, ER1 à ER4 | - | - | Banque, bâtiments militaires, installations officielles, installations pénitentiaires… | ||
Stadip Silence | Vitrage isolant acoustique | 6 à 32 | VF : 2 ou plusieurs verres + intercalaires en PVB acoustique ou silence | P4A | Rw de 35 à 47 dB | Peut être utilisé en double et triple vitrage pour une performance acoustique améliorée | Façades, toitures, cloisons intérieures |
Tableau non exhaustif réalisé en fonction de la base Batiproduits et des réponses des fabricants
(1) SV : simple vitrage, DV : double vitrage, VF : vitrage feuilleté. (2) Lire l’encadré p. 65.
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