Parc olympique des Jeux d’été. Munich, 1972.
© Doc. Christine Kantsinger/courtesy Atelier Frei Otto Warmbronn
Il est le premier architecte à recevoir le Pritzker Price à titre (presque) posthume : l’Allemand Frei Otto est en effet décédé le 9 mars, à l’âge de 89 ans, quelques jours avant l’annonce officielle de sa récompense par la fondation Hyatt, porteuse de ce prestigieux prix international. L’occasion de s’interroger sur la finalité de cette distinction, initialement destinée à promouvoir un architecte vivant pour « le talent, la vision et l’engagement » exprimés dans son œuvre bâtie, et qui n’aura réussi à couronner qu’in extremis la carrière de son quarantième lauréat…
Mais mieux vaut tard que jamais ! Car il n’est pas inopportun, en ces temps agités, de remettre en lumière la vision évanescente de ce praticien humaniste, éprouvé par le modèle artistique prôné par le IIIe Reich et les horreurs de la Seconde Guerre mondiale. En réponse, Frei Otto n’aura eu de cesse d’élever fragilement l’architecture vers le ciel. Concepteur des structures tendues, il a cherché à défier les lois de la gravité par une observation méditée des formes organiques, produisant des œuvres subtiles, souvent éphémères, inspirées par les nids d’oiseaux, les toiles d’araignées ou les coquillages.
En 1954, il soutient à l’université technique de Berlin une thèse de doctorat intitulée « La toiture suspendue, forme et structure ». Et réalise dans la foulée, avec le concours d’un concepteur de tentes, des structures en toile de coton, gonflées comme des voiles, notamment afin d’abriter un kiosque à musique lors d’une exposition fédérale de jardins à Cassel (Allemagne). Un geste délicat qu’il réitère en 1967 pour l’Exposition universelle de Montréal (Canada), où il recouvre le pavillon de l’Allemagne de l’Ouest d’une fine membrane textile. Il livrera son chef-d’œuvre à Munich en 1972, en déployant une couverture diaprée de 74 800 m2 au-dessus du parc olympique des Jeux d’été, véritable prouesse technique et esthétique qui lui assurera une reconnaissance internationale.
L’observation de la nature et de ses lois aura fait de cet homme de l’art une référence pour ses pairs. Tant « en rendant visibles les forces en mouvement à l’intérieur de la structure », comme l’a déclaré l’Italien Renzo Piano, Prix Pritzker 1998, que comme un chantre de la légèreté architecturale.