Le point sur… Tourisme : réglementation incendie nuancée selon le type d’établissement

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Le point sur… Tourisme : réglementation incendie nuancée selon le type d’établissement

Jean-Paul Henry, Ingénieur responsable de la Sécurité incendie et de l’accessibilité à la direction techniqueet des méthodesde Socotec

Le futur arrêté sur les résidences de tourisme fait une distinction entre hôtels et résidences, plus proches d’un lieu d’habitation.

Le nouvel arrêté sur les règles de sécurité incendie des hôtels et des résidences de tourisme sera publié à l’issue de sa période d’observation européenne. Le dispositif modifie la situation issue de l’avis du Conseil d’État du 3 mars 2009 qui faisait de toutes les résidences de tourisme des ERP. Il établit un distinguo entre les hôtels, les résidences hôtelières et celles qui se rapprochent plus de l’habitat. Ce texte est présenté par Jean-Paul Henry, ingénieur à la direction techniqueet des méthodes de Socotec.

CTB : Quelle est l’origine d’une telle clarification ?

Jean-Paul Henry : La réglementation est toujours un ensemble complexe plus ou moins équilibré qu’un texte peut venir bouleverser. Les effets peuvent revêtir une importante dimension financière. Concernant les résidences de tourisme, les situations peuvent être très différentes. Il peut s’agir d’établissements similaires aux hôtels où les prestations portent autant sur l’hébergement, la restauration collective que sur les loisirs. Mais il peut aussi s’agir d’établissements s’apparentant aux habitations où, conjointement à l’hébergement, seules des prestations de loisirs sont éventuellement proposées, les occupants disposant par ailleurs d’une grande indépendance (repas libres). On comprend bien que l’organisation et la gestion de ces deux catégories soient assez éloignées.

Pourtant, un avis du Conseil d’État du 3 mars 2009 stipulait que : « Entrent a fortiori dans le champ d’application de la réglementation des ERP les résidences hôtelières ou de tourisme au sens large – définies comme un ensemble homogène de chambres ou d’appartements meublés, disposés en unités collectives ou pavillonnaires, disposant d’un minimum d’équipements et de services communs et offerts en location pour une occupation à la journée, à la semaine ou au mois – nonobstant la circonstance que d’autres réglementations relatives à la construction de ces ensembles leur soient par ailleurs applicables ».

De fait, de nombreux projets étaient en attente et d’autres sérieusement perturbés, puisqu’ils n’avaient pas intégré les exigences des ERP dès la conception.

CTB : L’obligation était-elle impérative ?

J.-P. H. : En théorie oui, même si le ministère de l’Intérieur, via des « messages de commandements » adressés aux préfets en avait donné une interprétation permettant de laisser les exploitants se position-­ner par une déclaration. L’ambiguïté et le flou juridique demeurant, les décisions étaient disparates selon les zones géographiques et il était nécessaire de clarifier la situation.

CTB : Ce que fait ce nouveau texte dont le statut n’est pas définitif…

J.-P. H. : En effet, le texte disponible a été entériné par la Commission centrale de sécurité. Comme tout texte de ce type, il a été communiqué à la Commission européenne qui l’a publié sur le site Europa pour trois mois, délai nécessaire aux autres membres de la Communauté pour réagir s’ils constataient d’éventuelles entraves à la libre circulation. Ce délai passé (dès le 13 juin 2011), le texte pourra être publié par le législateur français. En attendant, force est de constater qu’il « pèse » déjà dans la pratique et que des décisions administratives ont été prises en s’y référant. Des précédents ont déjà eu lieu, le texte concernant les IGH a été validé il y a plus de trois ans et à ce jour, il n’est pas encore publié. Pourtant, il est utilisé comme référence pour la conception et la réalisation de projets majeurs. Cette application anticipée est d’ailleurs logique, puisqu’elle permet d’aller dans la direction qui a été choisie par les pouvoirs publics.

CTB : Quels en sont les points forts ?

J.-P. H. : Ils sont au nombre de trois essentiellement. En premier lieu, la clarification entre hôtels relevant des ERP et résidences de tourisme relevant de l’habitation. C’est l’article O1. Ensuite l’intégration de la réglementation incendie pour les personnes à mobilité réduite dans l’article O9. Et enfin, un dispositif important concernant les équipements de cuisine dans l’article O18.

Le paragraphe 1 de l’article O1 indique donc que ce texte est applicable et seulement applicable aux hôtels, dont l’effectif public est égal ou supérieur à 100 personnes et aux « établissements d’hébergements définis comme un ensemble homogène disposant d’un minimum d’équipements et de services communs et offerts en location pour une occupation à la journée, à la semaine ou au mois, faisant l’objet d’une exploitation collective homogène, dans lesquels l’effectif du public est supérieur à 15 personnes ». Et son paragraphe 2 de préciser que dès lors que ce caractère d’homogénéité n’existe pas, le règlement n’est pas applicable. C’est le cas par exemple des résidences à temps partagé, ou soumises au statut de copropriété des immeubles bâtis, qui relèvent alors de la réglementation sur l’habitat. Le paragraphe 3 indique que c’est au maître d’ouvrage ou à l’exploitant d’effectuer une déclaration qui permettra de définir le régime, quitte à le modifier ultérieurement par une autre déclaration.

CTB : Le dispositif lié à la réglemen­tation incendie simplifie-t-il les contraintes constructives ?

J.-P. H. : Ses conséquences sont sensibles et portent sur l’imposition d’espaces d’attente sécurisés. Depuis la mise en place du GN8, on rencontre beaucoup de difficultés sur le terrain pour répondre à cette exigence, notamment dans les hôtels. Dans cette nouvelle version, le législateur considère d’une part que les personnes concernées sont le plus souvent dans les chambres quand il y a ce risque. Il prend en compte pour les chambres, l’obligation de murs coupe-feu (plus ou moins longtemps) et de portes pare-flammes, ainsi que la présence de fenêtres, pour estimer que les chambres concernées obéissent à toutes les exigences liées à ces espaces d’attente sécurisés. Il n’est donc pas nécessaire d’en prévoir d’autres.

CTB : Peut-on désormais installer de véritables cuisines dans les hôtels ?

J.-P. H. : D’une situation dérogatoire, le texte fait une situation normale. L’article O18 indique que, même si l’établissement est considéré comme un hôtel, il est possible de disposer d’installations de cuisines ou de placards-cuisines dont le cumul de puissance des équipements peut atteindre 20 kW.

CTB : Le dispositif est-il évolutif ?

J.-P. H. : L’administration a anticipé sur le cas des résidences de tourisme qui deviendraient des hôtels. L’article O25 précise les limites des mesures rétroactives, citant ainsi les contrôles par la Commission de sécurité ou l’entretien et la vérification des installations techniques et des moyens de secours. En revanche, il ne fait pas état d’obligations constructives. Toutefois, dans le cadre de travaux ou de transformations ultérieurs, le nouveau dispositif s’applique sur les parties concernées.

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