Le paratonnerre, protection normalisée contre la foudre

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Le paratonnerre, protection normalisée contre la foudre

Centre de formation de RTE en Rhône-Alpes. Le para- tonnerre à dispositif d’amorçage Pulsar Hélita d’ABB France est fixé sur la toiture sur laquelle sont installés des panneaux photovoltaïques. Les descentes relient le paratonnerre à la terre. Ce paratonnerre dispose du système Rod Check qui permet de visualiser un impact foudre sur le PDA à distance au moyen d’une bague rouge visible sur le fuselage du paratonnerre. (Doc. ABB France.)Mise en œuvre d’un paratonnerre1. Pointe du paratonnerre h > 2 m au-dessus des éléments de toiture2. Support de paratonnerre3. Descente en cuivre étamé4. Éclateur de mât d’antenne5. Compteur de coups6. Joint de contrôle de la terre (h = 2 m)7. Protection mécanique (gaine rigide)8. Regard de visite9. Prise de terre en patte-d’oie (20 m maximum par branche)

Strictement encadré par la normalisation, le mode de protection contre la foudre d’un bâtiment est choisi avant tout sur des critères financiers, hormis dans le cas de sites sensibles.

La protection dite « paratonnerre » des bâtiments contre les impacts directs de la foudre est assurée classiquement par la pointe métallique inventée au xviiie siècle par Benjamin Franklin. Une ou plusieurs tiges métalliques à pointes captatrices sont fixées en hauteur sur la toiture d’un bâtiment. Ces points d’impacts préférentiels de la foudre sont reliés à des écoulements de faible impédance, de préférence en cuivre, qui dissipent le courant de foudre dans le sol, par le biais de prises de terre adaptées.

Dès lors que le bâtiment est équipé d’un paratonnerre, il est obligatoire de protéger les armoires électriques des surtensions de très forte amplitude, par l’ajout de parafoudres, qui sont à distinguer des parasurtenseurs qui limitent la tension en basse fréquence.
Lors de l’arrivée d’une surtension en haute fréquence, le parafoudre raccordé à une prise de terre se transforme en court-circuit, limitant la différence de potentiel entre les différents circuits de l’installation. Pour les bâtiments de grandes dimensions (hôpitaux, universités, gros tertiaire, etc.), une seule tige simple avec son rayon de couverture inférieure à 20 m ne suffit plus. Les deux solutions les plus anciennes consistent soit à multiplier les pointes sur le pourtour de la toiture, en multipliant les descentes associées, soit à mailler l’extérieur du bâtiment avec une cage métallique, qui fonctionne sur le principe de la cage de Faraday. Plus récent et plus économique, il est possible de placer un Paratonnerre dit « à dispositif d’amorçage » (PDA), dont le rayon de protection varie suivant le niveau de protection recherché entre 70 et 120 m.

Un risque statistique

Les normes sont traditionnellement basées sur un modèle simplifié de la foudre qui part d’une sphère électrogéométrique fictive, dont le rayon est proportionnel à l’intensité de la charge électrostatique qu’il contient. À partir de la position d’une pointe de paratonnerre, cette méthode sert à calculer les hauteurs et les distances protégées d’un bâtiment, pour une valeur de risque probabiliste correspondant au niveau de protection recherché. L’intensité d’un coup de foudre peut atteindre de 100 à 300 kilos ampère. La méthode de la sphère fictive prend en considération le coup de foudre avec l’intensité la plus faible, celle à 3 kA, dont la sphère est évaluée à vingt mètres de rayon. La dangerosité de ce petit volume vient de sa plus grande facilité à passer à côté d’une protection. Les calculs ont aussi besoin de connaître le risque géographique qui était anciennement donné par le niveau kéraunique « Nk », défini par le nombre de jours d’orage par an dans une région. Cette mesure qui compilait des relevés effectués par des observateurs humains a été remplacée par la densité de foudroiement « Ng », qui indique le nombre d’impacts foudre par an et par kilomètre carré. Ces statistiques sont mesurées par le réseau français Météorage, composé d’une vingtaine de capteurs de type LS7001 du fabricant finlandais Vaisala, qui permettent de géolocaliser chaque impact de foudre par combinaison de triangulation et de différence de temps d’arrivée.

Tige simple ou active

Un Paratonnerre à tige simple (PTS) en inox ou en cuivre doit dépasser de deux mètres minimum les points hauts du bâtiment. Le nombre de pointes, leur hauteur, et leur emplacement sont ensuite fonction du bâtiment et du niveau de protection souhaités, définis par l’analyse du risque foudre. En atmosphère orageuse, lorsque l’air ambiant se charge en ions, la pointe s’ionise et émet naturellement un traceur ascendant qui va à la rencontre de la décharge descendante du nuage, créant un courant de foudre. En rendant proactive la tige du paratonnerre, les fabricants visent à augmenter le rayon de protection qui est inférieur à vingt mètres pour une tige simple. Un premier essai fut infructueux. En 1914, un brevet a été déposé afin d’ajouter une pastille radio- active (isotopes Radium-226 ou Americium-241) près de la tête de la tige. Ce dispositif, censé augmenter l’ionisation de l’air, n’a pas prouvé son efficacité. Les Parads (Paratonnerres radio- actifs) ont pourtant été commercialisés à plusieurs dizaines de milliers d’exemplaires des années 30 aux années 80, jusqu’à leur interdiction au 1er janvier 1987.
Les Paratonnerres à dispositif d’amorçage (PDA) (en anglais Early Streamer Emission, ESE) sont apparus au début des années 80 en particulier en France et en Espagne. Le PDA de type Pulsar a été breveté conjointement en 1985 par le CNRS et le fabricant Hélita du Groupe ABB. Les fabricants, au nombre d’une petite dizaine, ont chacun leur astuce, afin d’ioniser au mieux et au bon moment la pointe du paratonnerre. Lors de l’arrivée de l’orage, le PDA puise l’énergie nécessaire dans le champ magnétique ambiant pour générer l’impulsion haute tension et provoquer le départ d’une amorce de traceur ascendant.
L’utilisation de l’énergie ambiante permet de rendre autonomes ces paratonnerres du point de vue énergétique. La majorité des PDA sont électriques. « Nos PDA actuels fonctionnent sur phénomène électrique, soit avec de l’étincelage, soit avec de la haute tension à proximité de la pointe. Le budget en R&D est aux alentours de 5 % de notre CA, met en avant Arnaud Lefort, P.-d.g. d’Indelec. Les améliorations portent sur comment mieux récupérer l’énergie, soit dans le champ électrique de l’orage, soit par des panneaux photovoltaïques. Plus futuristes, des recherches portent sur des sources lumineuses de type laser. »

Normalisation du PDA

En générant précocement une décharge qui va aller à la rencontre de l’éclair, le rayon de couverture d’un PDA peut dépasser 100 mètres en niveau IV de protection. La quantification de l’augmentation du rayon de protection apportée par une technologie PDA, est définie par la norme spécifique NFC 17-102.
Les constructeurs testent leur matériel soit dans des laboratoires internes, soit dans celui d’un organisme tiers. « Nous proposons toute la gamme de solutions de paratonnerres testées en laboratoire haute tension dans le respect des normes. Pour les tiges métalliques simples, le rayon de couverture est compris entre 2 et 20 m. Avec l’avance à l’amorçage, la protection va d’une dizaine de mètres à 50 ou 100 mètres », détaille Nicolas Alnet, directeur commercial de Franklin France. À dimensions égales, la norme française a ainsi validé que le PDA apporte une protection plusieurs fois supérieure à celle d’une simple tige.
Moins onéreux que la cage maillée ou les pointes simples, le PDA est devenu la solution privilégiée en France pour les bâtiments importants. Éric Morelle, gérant d’Axiome Conseils et ingénierie, qui a comme clients principaux les industriels et le gros tertiaire, met néanmoins en garde : « Le PDA ionise l’air et attire la foudre. En captant le coup de foudre, le bâtiment subit les effets indirects de la surtension. L’idée est d’orienter le passage du coup de foudre, en plaçant le PDA à l’endroit le plus judicieux, afin de limiter les effets indirects. Pour les installations à risques, je conseille une solution un peu plus coûteuse, qui est de mettre le PDA en hauteur sur un mât à côté du bâtiment à protéger. Dans les cas extrêmes, nous plaçons quatre paratonnerres ceinturant le bâtiment de l’extérieur ».

Les cages maillées, appréciées à l’étranger

Chaque paratonnerre (simple ou PDA) doit être relié à deux écoulements disposés à l’extérieur du bâtiment sur deux façades différentes. Ces conducteurs de descente doivent efficacement canaliser le courant de foudre vers les prises de terre, avec la plus faible impédance possible.
Le cuivre étamé, plus à même de conduire les hautes fréquences par effet de surface, est recommandé, ainsi qu’une grande surface latérale. La section de ces conducteurs doit être de 50 mm2 au minimum et leur tracé doit être le plus court et le plus rectiligne possible en évitant les remontées. Les conducteurs sont maintenus par des crampons et fixés au support à raison de trois attaches au mètre. Le tracé doit éviter la proximité des portes et accès du bâtiment, ainsi que celle des canalisations électriques, et doit demeurer à plus de trois mètres des colonnes de gaz.
Ces descentes doivent être interconnectées entre elles, et reliées électriquement aux éléments métalliques extérieurs importants situés à moins d’un mètre, afin d’éviter les arcs électriques. Lorsque deux paratonnerres équipent la même toiture, ils doivent être reliés entre eux à condition que le dénivelé ne soit pas supérieur à 1,50 m. Attention à l’effet de pile, les métaux doivent être compatibles, il faut par exemple éviter une descente en cuivre le long d’un bardage en aluminium. Au sol, la descente est protégée sur une hauteur de 2 m par une gaine rigide. À cette hauteur, sera intercalée une borne de coupure de très faible impédance, qui assure la liaison entre la descente et la terre, et permet de mesurer cette dernière.
Conformément à l’arrêté ministériel du 15 janvier 2008, dans le cas d’un PDA, un dispositif de comptage de coups de foudre est intercalé sur la descente au-dessus de la borne de coupure. La troisième partie de l’installation doit être enterrée avec soin, afin de faciliter le bon écoulement des charges électriques vers le sol. Normativement, la prise de terre doit répondre à une résistance inférieure à 10 Ohms, et posséder une valeur d’impédance d’onde la plus faible possible. Afin de dissiper au mieux les hautes fréquences, la norme NFC 17-102 recommande des prises de terre réalisées soit en type « patte-d’oie », en « piquets triangulés », ou en « piquets alignés ». La prise de terre générale est réalisée par un ceinturage à fond de fouille des bâtiments, en cuivre étamé.
Une autre approche est celle de la cage maillée. Peu utilisée en France, elle est surtout réservée aux sites sensibles de type Seveso, aux grands bâtiments logistiques et aux IGH. Elle se compose de plusieurs pointes captatrices (tiges simples de 30 à 50 cm) qui protègent la toiture et les arêtes principales du bâtiment. Ces pointes sont interconnectées par un maillage métallique en toiture et en façade qui englobe la structure à protéger. Les quatre niveaux de la protection d’un bâtiment dimensionnent l’espacement des mailles allant de 5 à 20 m de côté. Les descentes sont des rubans plats de cuivre interconnectés et reliés au ceinturage de terre en fond de fouille. Il est possible d’utiliser le ferraillage métallique du béton des façades du bâtiment, afin d’éliminer naturellement les courants de foudre dans le sol, à condition de le prévoir dès la construction. L’équipotentialité est assurée par une continuité des fers à bétons. Si les raccords se font par vis et écrous, il faut assurer l’équipotentialité en soudant de manière ponctuelle. L’acier a une moindre conductivité électrique que le cuivre d’une cage maillée, mais il est plus économique.

Une analyse du risque obligatoire pour les ICPE

Étape préalable à la conception ou la modification d’une protection, l’Analyse du risque foudre (ARF) consiste à identifier les événements consécutifs aux effets directs ou indirects de la foudre, à estimer les risques, en particulier les risques R1 en pertes en vies humaines, et à définir le niveau de protection exigé sur une grille allant de I à IV.
En fonction du résultat de l’ARF, une étude technique peut être menée par un bureau d’études qui définit et dimensionne les dispositifs de protection contre la foudre les plus appropriés (nombre et disposition des tiges paratonnerres, ou densité des mailles d’une cage), ainsi que le matériel parafoudre nécessaire pour protéger l’installation électrique. L’Arrêté du 15 janvier 2008 a rendu obligatoire l’Analyse du risque de foudre avant le 1er janvier 2010 pour certaines installations classées ou à risques, dont les Installations classées pour l’environnement (ICPE). L’étude technique devait être réalisée avant le 1er janvier 2012. « Nous sommes surtout positionnés sur ces entreprises soumises à autorisation, indique Laurent Sénéchal, responsable Développement assistance technique et innovation chez Dekra Industrial SAS. La phase de vérification des installations s’est terminée en 2012, celle de modification des installations démarre. »
L’UTE (Union technique de l’électricité) met à la disposition des professionnels le logiciel Jupiter, afin d’évaluer de manière réglementaire le niveau de protection nécessaire, aider à l’analyse de risques et fournir certains éléments pour l’étude technique. D’autres outils d’analyse de risque foudre sont proposés par les fabricants ou les BE comme Indelec (Protec 2000), Dehn (DEHNrisk-Tool), Franklin (Risque Foudre) ou RG Consultant (Lightning Risk Analysis Multilingual). Enfin, deux labels principaux existent pour qualifier et identifier les professionnels compétents dans le domaine de la foudre. Il s’agit de Qualifoudre attribué par l’Ineris et de F2C (Foudre contrôle certification ) certifié par Global Conseil.

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