© Pascal Poggi
La Fondation Abbé Pierre alerte sur la précarité énergétique estivale dans son dernier rapport du 29 juin. Ce phénomène, déjà connu depuis plusieurs années, est directement lié aux conditions de logement ainsi qu'aux quartiers des villes fortement urbanisées. Avec le réchauffement climatique en cours, cette précarité risque de s'aggraver dans les années à venir. Le rapport met en lumière les problèmes rencontrés et propose des solutions pour y remédier.
C’est la douche froide. La Fondation Abbé Pierre publie un rapport sur la précarité énergétique estivale, un problème souvent négligé mais lié au mal-logement, une cause qu'elle défend. Le constat est alarmant : bien que la précarité énergétique soit généralement associée au froid hivernal, elle est largement sous-estimée en été, en particulier pendant les vagues de chaleur. Selon la Fondation Abbé Pierre, les 5,2 millions de logements mal isolés et difficiles à chauffer en hiver se transforment en véritables bouilloires énergétiques en été. En 2022, près de 60 % des Français ont indiqué avoir subi la chaleur dans leur logement pendant au moins 24 heures, soit une augmentation de huit points par rapport à 2020, selon les données du baromètre du médiateur de l'énergie. Cette souffrance est principalement attribuée à la canicule, mais 19 % des personnes interrogées estiment que leur logement est mal isolé et mal ventilé. Les populations les plus vulnérables sont les personnes précaires urbaines, les jeunes de 18 à 24 ans et les personnes âgées, particulièrement vulnérables aux canicules. Dans les quartiers prioritaires, 70 % des foyers affirment qu'il fait trop chaud en été, contre 56 % dans le reste de la France.
Impacts de la chaleur
Les bâtiments les plus affectés par les fortes chaleurs, selon la Fondation Abbé Pierre, sont ceux dotés de surfaces vitrées exposées à l'est, à l'ouest et ceux ayant de grandes surfaces vitrées non protégées au sud. Les effets de la canicule sont particulièrement ressentis en milieu urbain en raison des îlots de chaleur urbains (ICU), caractérisés par des températures élevées et un manque de végétation. Les ménages vivant dans ces zones urbaines sont souvent confrontés à des conditions de surpeuplement, occupent des logements moins bien isolés et ventilés, et sont rarement équipés de climatisation. La Fondation souligne également qu'il existe une réglementation stipulant que les propriétaires bailleurs doivent assurer une température minimale de 19 degrés en moyenne dans les logements loués. Cependant, il n'y a pas de température maximale spécifiée légalement pour les locations. « Un décret en application de la Loi Climat et Résilience publié en juillet 2021, donne au locataire l’autorisation tacite du bailleur pour réaliser des travaux de rénovation énergétique du logement qu’il loue. Parmi les travaux autorisés, l’installation de protection solaire pour les parois vitrées ou opaque en font partie, mais à ses frais ! », s'indigne la Fondation.
Des solutions, pas au rabais !
La Fondation Abbé Pierre propose plusieurs solutions pour faire face à la précarité énergétique estivale. Des volets, des stores et des auvents peuvent être utilisés pour protéger les fenêtres des rayonnements directs du soleil. La végétalisation des toitures et l'installation de panneaux solaires peuvent aider à bloquer les rayonnements solaires et réduire les températures à l'intérieur des bâtiments. Les couleurs claires sur les revêtements extérieurs, en particulier sur les toitures, permettent de réduire la chaleur absorbée et de diminuer la température à l'intérieur des habitations pendant les périodes de canicule. Elle recommande d'optimiser la ventilation naturelle, en particulier le soir, et d'installer des brasseurs d'air fixes au plafond. Ces dispositifs permettent de baisser la température ressentie de 4 degrés et sont bien plus économes en énergie que les climatiseurs. La présence d'arbres et de végétation peut créer une différence de température d'environ 10 degrés entre les zones arborées et les zones urbaines. Elle incite à mettre en place des bassins et des brumisateurs, de débitumer les espaces et de réduire le trafic routier pour renforcer la présence d'eau et atténuer les îlots de chaleur urbains. Elle souhaite que soient « intégrés les critères de confort d’été aux caractéristiques d’une rénovation performante, et même aux critères d’attribution des aides » ou encore faire évoluer le DPE pour que le « confort d'été » soit obligatoire et pris en compte dans l'étiquette du logement. Enfin, plus largement, c'est un plan d'urgence sur trois ans que souhaite la Fondation. Un plan qui réunirait collectivités, Etat, bailleurs sociaux, « afin de proposer des protections solaires à tous les logements, en lien avec France Renov et les dispositifs de repérage et d’accompagnement existants ».