L’objectif était de décrire les techniques pour faciliter la généralisation de ces panneaux en mur mais également en plancher. FLORENT LYON ingénieur au centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB)
Au vu de leurs performances techniques, les panneaux massifs de bois contrecollés croisés (CLT) deviennent économiquement intéressants pour des constructions d’au moins quatre niveaux. Leur mise en œuvre dans le neuf a fait l’objet d’un guide Rage publié en février. Florent Lyon, ingénieur au Centre scientifique et technique du bâtiment, a dirigé la rédaction de celui-ci. Il nous en présente les principaux éléments.
Comment les panneaux massifs de bois contrecollés croisés sont-ils réglementés ?
Essentiellement par l’avis technique, et ce, depuis une dizaine d’années. Non traditionnels, ces procédés ne peuvent pas se référer à une norme produit, même si une norme harmonisée est prévue. Aucun DTU ne les évoque non plus et ils sont absents de l’Eurocode 5. Il est envisagé de les intégrer à ce dernier texte pour sa version 2020. À terme, les panneaux en bois massif contrecollés croisés, couramment appelés « CLT » pour cross-laminated-timber, devraient faire l’objet d’un DTU ou, pour le moins, être pris en compte dans ceux concernant les planchers en bois.
En attendant, il était nécessaire de disposer d’un document qui traite transversalement ces composants de construction, disponibles dans de grandes dimensions (18 x 20 m dans une largeur maximale de 3 cm) et qui permettent de créer des murs d’une hauteur d’étage. Bien qu’ils présentent des avantages techniques réels, leur usage rencontre quelques freins, notamment économiques, alors qu’ils deviennent intéressants pour des constructions R + 3 au moins. En dessous de cette hauteur, l’ossature en bois reste plus compétitive. En France, nous n’avons encore que peu d’exemples, qui ne dépassent pas R + 7 d’ailleurs, alors que dans d’autres pays comme la Grande-Bretagne, il existe des immeubles R + 10 en CLT.
Comment ce guide Rage est-il conçu ?
Une grande partie des éléments est issue des avis techniques attribués à des procédés particuliers. Différents travaux avaient été menés dans ce cadre pour aborder aussi bien l’acoustique que la thermique, ou encore le transfert de la vapeur d’eau, à partir d’études diverses. Il était intéressant d’exploiter leurs résultats.
L’objectif était de décrire les techniques pour faciliter la généralisation de ces panneaux employés en mur mais également en plancher. Le document donne des éléments de dimensionnement et s’intéresse plus particulièrement à la gestion des difficultés liées à la thermique, en développant de bonnes pratiques pour réduire l’effet des ponts, ou à l’acoustique, avec des exemples.
Quel champ le guide couvre-t-il ?
Ce document ne porte que sur les solutions « tout-CLT ». Il ne parle pas d’autres combinaisons, comme les techniques mixtes avec chevronnage ou solivage, plus traditionnelles.
Il fait en quelque sorte la démonstration de ce qu’il est possible de construire. Les solutions proposées ne sont retenues que parce qu’elles apportent une certitude de bon fonctionnement au regard des différentes contraintes prises en compte (thermique, acoustique, comportement à l’humidité, etc.). Il n’est pas assuré, en revanche, qu’elles soient les meilleures du point de vue économique.
Le guide parle d’abord de la fabrication des panneaux, puis de la conception des ouvrages.
Un chapitre est en effet consacré aux matériaux (bois, adhésifs, éléments de fixation, etc.), à leurs performances exigibles (résistance mécanique, masse volumique, comportement à l’humidité, traitement de protection). Les finitions extérieures et intérieures sont traitées. Enfin, sans s’attarder sur ce qui relève d’autres textes, les obligations en matière de traitements de protection ou de résistance au feu sont rappelées.
Le cœur du sujet est ensuite abordé dans le chapitre consacré à la conception des ouvrages et à leur dimensionnement. L’ensemble des exigences est passé en revue et, pour chacune, des méthodes de calcul et des solutions sont présentées.
Dans le cas des toitures, sont traitées les toitures-terrasses et les toitures en pente (avec sarking ou sur ossature), avec une isolation intérieure et une isolation extérieure. Pour les murs, on trouve aussi les différents cas de figure d’isolation par l’extérieur, d’isolation mixte (extérieure et intérieure) et intérieure seulement. Les dalles basses sont également abordées.
Pour chaque exemple, sont indiquées dans des tableaux des valeurs de référence, notamment thermiques, y compris aux liaisons : murs-planchers bas, mur-plancher intermédiaire, mur-toiture inclinée, etc. Des schémas les accompagnent précisant la conception de chaque détail et quand il est nécessaire de prévoir un pare-pluie ou un écran de sous-toiture, des joints comprimés, voire des bandes adhésives (par exemple, aux liaisons panneaux-isolant). Le cas des baies, de la liaison des parois aux fenêtres et des encadrements, n’est pas oublié.
Le guide insiste sur le comportement hygrothermique et l’isolation acoustique.
Une méthode d’évaluation des risques de condensation est détaillée en fonction des conditions climatiques et des ambiances. Elle aide à déterminer la nécessité d’un pare-vapeur en fonction des configurations et des résultats. L’acoustique - dont les grands principes de gestion sont rappelés, comme pour la thermique - fait l’objet de descriptifs de solutions types éprouvées, elles aussi illustrées par des schémas.
D’un point de vue structurel, les principes de dimensionnement des planchers et des murs qui sont énoncés donnent l’occasion de traiter certains phénomènes particuliers, comme le risque de pianotage sur les planchers ou le comportement des différents modes d’assemblage (vis, pointes) en fonction des sollicitations auxquels ils sont soumis. C’est d’ailleurs l’occasion pour les rédacteurs de signaler les solutions proscrites dans certaines configurations.
Le chapitre 6 est totalement consacré à la mise œuvre.
Ce chapitre passe en revue toutes les étapes du montage. Il commence par indiquer les bonnes pratiques de stockage, de manutention et de levage. Ces opérations peuvent avoir une influence sur le dimensionnement des panneaux et exiger des renforcements pour que les composants résistent à des sollicitations temporaires spécifiques. Vient ensuite l’étape traditionnelle de la réception du support.
Chaque cas de pose, verticale ou horizontale, est étudié, y compris pendant les phases provisoires de chantier.
Un chapitre traite des typologies d’assemblage : double cisaillement, simple cisaillement, deux simples cisaillements, joint à mi-bois. Pour ce dernier type d’assemblage, l’attention est attirée sur le risque de fendage, du fait de la traction induite. Aussi n’est-il admis en plancher que moyennant une justification et une attention particulière.
Assemblages bois-bois ou bois-métal, points singuliers (porte-à-faux, garde-corps, acrotères) sont examinés, avec des solutions détaillées et dessinées.
Novation de ce guide, les modes d’intégration des menuiseries disposent, pour leur association avec ces panneaux, d’une première référence. En effet, les avis techniques publiés jusqu’à présent n’abordaient pas ce sujet.
Une série particulièrement riche de schémas illustre l’ensemble des toitures, en pente ou terrasses, ainsi que leurs couvertures : émergences, points singuliers, etc.