Pour tenir compte d’un risque feu aggravé par l’épaisseur de l’isolation, un Cahier de mise en œuvre des Etics précise les détails de pose.
L’accroissement sensible des performances thermiques exigées par la réglementation implique de plus en plus fréquemment le choix d’une isolation thermique par l’extérieur. Ce fort développement, aussi bien dans les constructions neuves qu’en réhabilitation, va de pair avec une augmentation des épaisseurs d’isolants.
Parmi les procédés existants, le marché est actuellement dominé par les Etics (Externe Thermal Insulation System, ou ITE pour Isolation thermique par l’extérieur), systèmes associant un isolant, un enduit armé et une finition. Ils font l’objet d’un marquage CE par l’intermédiaire d’un ATE (Agrément technique européen) et leur mise en œuvre est gérée par des Documents techniques d’application (DTA).
Cette mise en œuvre évolue et est précisée, dans le but d’intégrer les dispositions relatives à la protection incendie indiquées dans l’IT 249 (Instruction technique) du 24 mai 2010. Cette IT indique les dispositions, afin de réduire le risque de propagation du feu aux niveaux supérieurs par les façades. Nicolas Juraszek, ingénieur spécialiste de l’enveloppe du bâtiment à la direction des Techniques et des méthodes de Socotec, présente les nouvelles contraintes apportées dans un nouveau Cahier publié par le Cstb et consacré à la mise en œuvre des Etics.
CTB : Quelles sont les raisons de ce texte ?
N.J : L’IT 249 est consacrée au risque incendie en façade et s’applique aux ERP, aux IGH et aux immeubles d’habitation. Dans sa dernière version, qui date du 24 mai 2010, elle prend en compte les surépaisseurs d’isolants induites par les exigences des nouvelles Réglementations thermiques puisque, d’une version qui envisageait 100 mm de produit, nous sommes passés à une version permettant des épaisseurs pouvant aller jusqu’à 300 mm.
Mais, si l’IT donne les grandes lignes des dispositifs à prévoir pour ces systèmes, il n’existait pas de document précisant comment appliquer les solutions qu’elle préconisait, tout en vérifiant leur adéquation avec les autres problématiques telles que la résistance mécanique ou la durabilité. Aussi, était-il nécessaire de publier un guide de mise en œuvre de bandes filantes pour protection incendie. C’est ce qu’a fait le Cstb avec ce Cahier.
L’objectif de l’IT 249 est de prévoir un dispositif qui permet de retarder d’au moins une demi-heure la transmission du feu à l’étage N 2, s’il part de l’étage N. Il est évident que selon la réaction au feu de l’isolant, la propagation ne sera pas du tout la même, tout comme un enduit fortement chargé en masse organique facilitera cette propagation. On raisonne donc sur le couple isolant enduit. Il faut s’assurer au préalable que le couple employé est autorisé avant de pouvoir appliquer les prescriptions du Cahier.
CTB : En quoi consistent ces prescriptions ?
N.J. : Ces prescriptions sont applicables dans les situations suivantes :
• L’isolant doit être en polystyrène expansé et doit présenter une Euroclasse E au minimum. La question ne se pose pas avec un isolant incombustible, c’est-à-dire classé au moins A2-S3, d0, car aucune disposition de protection n’est à prévoir. Les autres isolants n’étant pas visés par l’IT 249, ils ne le sont pas non plus par le Cahier.
• Le support doit impérativement être en maçonnerie ou béton armé. Les Etics sur un support bois ne sont pas traités par l’IT 249.
• Les enduits visés sont des enduits hydrauliques ou minces, dont la fraction massique organique est inférieure ou égale à 10 %.
Pour ces situations, l’IT 249 prévoit différentes solutions de protection, dont la solution dite « P4 » qui consiste à poser une bande filante d’isolant incombustible entre tous les niveaux lorsque le C D s’applique, et tous les deux niveaux, dans le cas inverse.
Concernant cette bande, le Cahier est plus exigeant en matière de classement au feu que l’IT. Celle-ci prévoyait au minimum un isolant classé A2-S3, d0 quand le Cahier demande un A1 (incombustible). La hauteur de la bande doit être comprise entre 20 et 30 cm. La mise en œuvre est complètement décrite, ainsi que l’emplacement et les distances à respecter, notamment par rapport au niveau inférieur. Le mode de fixation est double : collage en plein et fixation mécanique par chevilles.
Afin d’assurer la continuité et surtout la durabilité de l’enduit, il est nécessaire de renforcer l’enduit par une armature de renfort au droit de la bande incombustible qui doit déborder de 20 cm de chaque côté.
Dans le cas particulier des Etics fixés mécaniquement à l’aide de profilés PVC, il est imposé que la fin de la fixation de l’isolant (auprès de la bande incombustible) soit assurée par une fixation par chevilles.
CTB : Le traitement des joints est-il décrit ?
N.J. : Le texte apporte des précisions sur les tolérances des joints verticaux de la bande qui sera la plus continue possible. Ainsi, les éventuels joints verticaux ouverts jusqu’à 5 mm doivent être systématiquement rebouchés avec de la laine de roche en vrac. Au-delà, il faudra procéder à la dépose de la bande.
CTB : Qu’en est-il de la rénovation ?
N.J. : Le cas de la rénovation est pris en compte. Le Cahier décrit le moyen d’assurer un renforcement d’isolation existante, et précise que la bande d’isolant incombustible doit, au total, atteindre l’épaisseur cumulée de l’ancien isolant et de l’isolant rapporté ; ce qui est logique, afin de ne pas avoir de rupture de la protection dans l’épaisseur de l’isolant. Par ailleurs, la bande d’isolant incombustible doit être directement fixée sur le support ; ce qui signifie qu’à cet endroit, l’ancien isolant doit être retiré et le support nettoyé pour assurer un bon accrochage du nouveau et empêcher le passage de flammes ou de gaz chauds entre le support et la bande.
CTB : Peut-on déroger à ces directives de pose ?
N.J. : Premièrement, le Cahier ne permet pas d’étendre le domaine d’application de l’IT 249. Les systèmes ou les supports non-visés par l’IT ne sont pas non plus dans le domaine d’application du Cahier. Pour tous les autres cas, il est nécessaire d’obtenir un avis favorable du Cecmi (Central European Center of Management Innovation) sur la base d’une appréciation délivrée par un laboratoire agréé ayant des compétences en réaction et résistance au feu.
En revanche, en ce qui concerne la mise en œuvre de la solution de protection, l’IT 249 prévoit d’autres configurations, comme par exemple le renforcement de l’enduit au niveau des baies. Leur mise en œuvre est donc possible, mais elle n’est détaillée et explicitée par aucun texte.