Marc Ducourneau, directeur général de l'Agence Qualité construction (AQC)
« L’AQC vient de se voir confier la gestion et l’animation du programme d’accompagnement des professionnels “ Règles de l’art Grenelle environnement 2012 ”. Pourquoi un tel programme ? Simple-ment, parce que la mise en œuvre du Grenelle environnement dans le Bâtiment va considérablement modifier les habitudes de travail. Il va falloir apprendre à travailler ensemble, afin de garantir aux clients des performances multiples (thermique, acoustique, qualité de l’air…) et chaque jour plus nombreuses ! D’ailleurs, les assureurs commencent à suivre les professionnels compétents et leur offrent les garanties nécessaires, au moins pour la performance thermique. Les “ Pros de la performance énergétique ” ou les “ Éco-artisans ” sont depuis l’origine accompagnés d’une démarche globale, qui incite chaque professionnel à travailler avec ses collègues d’autres corps de métier. Une entreprise sollicitée pour un remplacement de chaudière a le devoir de proposer à son client un diagnostic complet, mettant en lumière des besoins prioritaires d’isolation et pour lesquels il fera des propositions en liaison avec ses confrères. Le travail en synergie entre les différents corps d’État doit prendre le pas sur la simple promiscuité sur un même chantier ! Garantir l’étanchéité à l’air de l’ouvrage, récupérer le maximum de calories sur l’air extrait et maîtriser le renouvellement d’air indispensable à sa bonne qualité n’est pas l’affaire d’un seul corps d’État, mais de tous. Ceux du second œuvre sont les premiers concernés, car tout passage de canalisation devient une potentielle source de fuite. L’organisation du chantier, la détermination de chacun, la qualité d’exécution de tous, l’autocontrôle à chaque étape deviennent la condition du succès. Bonne nouvelle, les professionnels progressent plus vite que certains ne le craignaient, il faut le dire haut et fort !
Mais la structure de nos règles et DTU est-elle toujours adaptée ? Devra-t-on les structurer par ouvrage, par fonction, par corps d’État ? Tout en évitant qu’un artisan ne soit obligé de consulter plusieurs textes pour réaliser son chantier. Ces nouvelles habitudes entraînent des modifications des règles de construction devant être écrites, c’est l’objet du programme « Règles de l’art 2012 ». Aujourd’hui, les DTU ne prennent pas en compte ces préoccupations. Dans l’ancien, là où se fera l’essentiel des économies attendues, il n’y a aucune règle. Les professionnels adaptent les règles du neuf ou font du neuf dans l’ancien. Ce n’est pas satisfaisant à l’heure où de nouveaux matériaux, de nouvelles techniques spécifiques à l’ancien arrivent sur le marché. C’est pourquoi, la Capeb et la FFB, rejointes par le Cstb, l’AQC et la Coprec, ont mis sur pied un vaste programme de réexamen de l’ensemble du corpus des règles de l’art. Il s’agit en quatre ans de réaliser, à partir d’une typologie des bâtiments et des techniques les plus efficaces, un examen complet des règles existantes, de voir celles qui doivent être complétées ou modifiées et d’écrire celles qui manquent, en particulier dans l’ancien. Cela concerne toutes les professions associées à ce projet. L’AQC est chargée de la coordination et de la gestion. Le Cstb en est le garant technique.
Des techniques et matériaux nouveaux apparaissent et s’imposent. Il convient de ne retenir que les plus efficients. Trop de produits arrivent sur le marché sans garanties. Comment s’étonner, dès lors, des désordres qui survien-nent ? Dire que la “ plume de mammouth ” ou le “ poil de canard ” doivent être testés sérieusement, n’est pas de vouloir freiner l’innovation. Le Cstb ne s’y est pas trompé en créant le « Pass’Innovation » (1) qui permet aux assureurs d’accompagner l’innovation dans des conditions sérieuses.
Quant aux utilisateurs, eux aussi devront être formés. Radios, télés, presse, associations de consommateurs ou de locataires, carnets d’entretien… tous les moyens doivent être utilisés. Il existe un permis de conduire, pas un permis d’habiter… À quoi sert une maison économe si, en accrochant ses tableaux au mur, l’occupant perce l’étanchéité à l’air ?Pourquoi maîtriser les entrées d’air si les bouches d’aérations sont bouchées ? Pourquoi maîtriser l’énergie si les fenêtres sont ouvertes au-delà du raisonnable ? À quoi sert une installation gérée par des systèmes informatiques complexes, si l’occupant n’a pas été formé à leur utilisation ? La vie du logement, le succès du Grenelle, c’est aussi l’affaire des occupants.