© Doc. Agrob Buchtal.
Suite à la norme d’essai XP P 05-010 qui oblige les fabricants de carrelage à classer le niveau de glissance de leurs carreaux, est apparue la norme XP P 05-011. Elle oblige désormais les concepteurs à prescrire le revêtement en fonction de son aptitude à sécuriser le local dans lequel il sera employé. Explications de Jean-Paul Balcon, ingénieur à la Direction des techniques et des méthodes à la Socotec.
CTB : Pourriez-vous nous redéfinir le domaine d’application et le contenu de la norme XP P 05-010 applicable depuis janvier 2004 ?
J-P. Balcon : Pendant des décennies, la valeur d’antiglissance d’un revêtement de sols était quantifiée à partir de l’essai dit du « plan incliné », codifié en Allemagne suivant deux normes DIN. Le revêtement de sols à tester est placé sur une surface d’essai inclinable à partir de l’horizontale.
Le revêtement (des carreaux céramiques) est soit humidifié avec de l’eau (associé à un agent mouillant) avec un opérateur pieds nus, soit enduit d’huile avec un opérateur chaussé. Quand l’opérateur commence à glisser, l’essai est arrêté et le PV se traduit par une valeur d’angle.
Jusqu’en 2004, les valeurs d’angle, basées sur les normes DIN, apparaissaient dans les documentations de fabricant selon deux classements :
* Un classement des carreaux destinés aux locaux humides (marche pieds nus) selon trois groupes : A, B, ou C.
* Un classement des carreaux destinés aux sols des industries agroalimentaires (marche pieds chaussés) classés cette fois en R10, R11, R12 et R13.
La norme d’essais XP P 05-010 de janvier 2004 a, en quelque sorte « francisé » les deux normes DIN en apportant une nouvelle classification qui rend caduque les classifications précédentes.
CTB : Quelles sont ces nouvelles classes ?
J-P. B : Les procès-verbaux d’essais que les maîtres d’œuvres se doivent impérativement de demander aux fabricants, positionnent maintenant le revêtement suivant les classes suivantes :
* Pieds nus : classes PN 6 à PN 24.
* Pieds chaussés : classes PC 6 à PC 35.
Précisons que le PV s’applique nominativement à chaque carreau ainsi qu’à un format précis. Il faut savoir qu’à qualité égale, plus le carreau est grand, plus la glissance est grande du fait d’un pourcentage de joint (réputé antiglissant) moindre. Précisons également, à titre d’exemple, que lors de l’essai avec un carreau classé PN6, l’opérateur glisse selon un angle compris entre 6 et 12°. Enfin, la norme XP P 05-010 a ouvert l’essai à d’autres revêtements. Sont visés également les sols en résine et les peintures, les sols résilients (PVC) et les stratifiés.
CTB : Dans cette norme, il n’est nullement fait mention d’un local spécifique.
J-P. B : D’où l’intérêt de l’arrivée de la norme XP P 05-011 « Classement des locaux en fonction de leur résistance à la glissance » d’octobre 2005, qui définit cette fois l’adéquation entre un local et un revêtement. Cette norme s’applique aux revêtements décrits dans la norme d’essai et utilise les classes PN 6 à 24 et PC 6 à 35. De manière précise, cette norme établit d’abord un classement pour les locaux humides sur lesquels on marche pieds nus et les locaux agro-alimentaires.
Mais elle va plus loin en définissant très précisément les classements de carreaux à prendre en compte dans les cuisines collectives, mais aussi dans différents locaux dont les circulations extérieures (terrasses, balcons, coursives…). La grande nouveauté est l’exigence de sols antidérapants en galeries commerciales et lieux affectés au transports (gares, aéroports…).
La norme contient ainsi des pages et des pages de classement par type d’ouvrage et oblige tous les concepteurs à s’y référer.
CTB : Quelles sont les limites de la norme XP P 05-011 ?
J-P. B : La première limite concerne les revêtements de sols réalisés in situ. Ce qui pose le problème suivant : comment apporter la preuve que le sol in situ, à l’état neuf, est équivalent au niveau finition à celui testé en laboratoire suivant l’essai du plan incliné. Il manque une corrélation avec un appareillage mobile permettant de confirmer ce point.
La seconde limite concerne l’antiglissance d’un revêtement au bout de quelques années d’usure liée à la marche et surtout au nettoyage. Là encore, un appareillage portatif permettrait de vérifier cet éventuelle usure. Ainsi, le chapitre introduction de la norme est fondamental et s’adresse en particulier au maître d’œuvre et au maître d’ouvrage. Il précise que tout revêtement de sols doit être associé à une procédure de nettoyage qui comprend le type de matériel, la fréquence et les produits d’entretien.
En effet, avec un disque abrasif non adapté, il est possible de rendre certains revêtements de sols « lisses » après le premier nettoyage !
Un appareillage mobile permettant un suivi du sol en place par le maître d’ouvrage est le complément nécessaire à apporter à cette norme.
Enfin, la notion d’usure doit faire comprendre aux prescripteurs qu’ils ont toute liberté pour aller au-delà des minima requis dans les classements.
Toutefois un revêtement antidérapant ayant une classe plus élevée demande une méthodologie et/ou une fréquence d’entretien plus forte pour respecter le critère d’hygiène.