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Exploiter les surfaces disponibles en toiture

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Exploiter les surfaces disponibles en toiture

Pose de capteurs thermiques et photovoltaïques sur la surélévation d’une résidence sociale et universitaire, Paris xv e . (Docs. R.Delacloche/Observ’er et Agence Équateur.)

Face au coût des opérations de réhabilitation et à la pénurie de logements auxquels sont confrontés les pouvoirs publics, la surélévation des bâtiments existants s’avère une alternative intéressante, autant sur le plan économique, qu’environnemental et technique.

La réhabilitation des immeubles de logements sociaux vise plusieurs objectifs tels que l’augmentation de l’efficacité énergétique, la mise aux normes réglementaires et l’amélioration du confort des occupants. À ceux-là s’ajoute désormais l’exploitation optimale des surfaces foncières.

La rénovation du parc résidentiel existant devrait se réaliser, selon les objectifs du Grenelle de l’environnement, au rythme de 400 000 logements par an (dont 20 % de logements sociaux) dès 2013. Or, cette rénovation nécessaire est confrontée aujourd’hui à une sévère pénurie de logements, doublée d’un fort déficit en terrains constructibles, le tout sur fond de croissance démographique constante.
Des millions de nouveaux logements devraient être construits d’ici à 2030 en France pour pallier les carences. Par conséquent, l’exploitation des surfaces disponibles en toitures - au cours d’une opération de réhabilitation globale du bâti - peut être une réponse adaptée à ce contexte foncier tendu. Elle permet, tout en réactualisant le bâti ancien, de remédier au manque de logements, de favoriser la densification des villes et du tissu bâti, de lutter contre l’étalement urbain, de redynamiser les quartiers, etc.

Solution répondant à diverses problématiques

La surélévation d’un bâtiment lors de sa rénovation présente par ailleurs des avantages économiques. La vente des nouvelles surfaces construites permet de financer tout ou partie des travaux, voire de redistribuer les économies engrangées sur d’autres opérations de réhabilitation.
L’aspect énergétique n’est pas en reste. Les immeubles à rénover, construits pour la plupart dans les années 50 à 70, nécessitent une lourde intervention sur leur enveloppe, et notamment sur leur toiture, zone d’où s’échappent environ 30 % des déperditions thermiques. Coiffer ces toitures par de nouveaux étages isolés et étanches permet d’éviter des travaux trop importants et coûteux sur l’ancienne structure (renforcement de l’isolation, suppression des ponts thermiques, etc.).
Au-delà de ces divers aspects, et notamment dans le cas des immeubles de logements sociaux, une surface habitable dégagée en toiture et proposée en accession à la propriété favorise la mixité sociale et les efforts engagés dans ce sens par les bailleurs sociaux. Elle permet de requalifier et redynamiser les grands ensembles. Les expériences déjà menées montrent que l’extension verticale peut aussi être l’occasion de créer de nouveaux espaces de vie commune, ou d’enrichir la biodiversité grâce à la végétalisation. Et de fait, d’améliorer la qualité de vie du site.
La valorisation des toits du parc social, encore peu pratiquée en France, se présente donc comme une réelle opportunité de renouveau, à diverses échelles (bâtiment, quartier, ville) et aux avantages multiples (économique, énergétique, environnemental, foncier, social, urbain, etc.).

Structure bois ou acier pour surcharge minimale

Une opération de surélévation requiert une étude approfondie du bâti existant, un sondage aux pieds des fondations pouvant être nécessaire. Il faut que la structure du bâtiment existant soit capable de reprendre la surcharge liée à la rehausse. Si la plupart du temps les édifices peuvent supporter une surcharge équivalente à 20 % de leur poids sans renforcement des fondations et structures existantes, il faudra dans d’autres cas consolider l’existant, ou alors s’en affranchir. Soit par le renforcement de poteaux porteurs, l’ajout de nouvelles poutres porteuses de répartition et éventuellement la création d’un nouveau sommier de renfort au-dessus de l’ancienne toiture. Soit par la pose d’une structure porteuse totalement indépendante, qui sera posée, tel un portique, au-dessus de l’ancien bâtiment. Cette dernière solution privilégiant les systèmes constructifs en acier, en raison des importantes portées nécessaires. Dans tous ces cas, le vide ménagé entre l’ancienne et la nouvelle construction permet de faire passer les réseaux et gaines techniques. Logiquement, les solutions légères en bois ou en acier s’imposent dans les opérations de surélévation. Mises en œuvre en filière sèche, elles présentent également l’avantage d’être préfabriquées, ce qui induit automatiquement une réduction du temps et des nuisances de chantier. Un atout indéniable pour des opérations qui se font généralement en site occupé. Sur un chantier accessible, les éléments préfabriqués pourront être de très grandes dimensions et montés par grue. En site contraint, de petits éléments manuportables seront préférés.

Pratique naissante en logement social

Si la surélévation des maisons individuelles ou petits immeubles en copropriété peut déjà être considérée comme pratique courante, l’expérimentation dans le domaine de la réhabilitation du parc social est encore assez rare.
À Paris, un ancien foyer désaffecté du xv e arrondissement a subi en 2008 une réhabilitation complète combinée à une extension et à une surélévation. À l’époque, les problématiques liées à la mutation du patrimoine parisien (densification du bâti, réhabilitation énergétique) étaient tout juste abordées dans les réflexions sur le Grand Paris.
Le projet a consisté à réhabiliter l’immeuble de sept étages, dont la construction datait de 1926, pour y insérer deux programmes, une résidence sociale (Adoma) et une résidence universitaire (Crous). L’agence d’architecture Équateur s’est chargée du projet, pour le compte de la Société immobilière d’économie mixte de la Ville de Paris (SIEMP). Le bâtiment présentant une enveloppe trop réduite pour contenir tous les locaux, la parcelle a dû être densifiée, dans la limite réglementaire imposée par les gabarits et PLU de l’époque. Or, la modification du PLU de 2009 visant à favoriser l’application du Plan Climat et la production de logements sociaux n’étant pas encore effective, les questions d’extension, surélévation ou installations solaires ont dû faire l’objet d’un travail d’intégration complexe, en collaboration avec l’Architecte des bâtiments de France (ABF) et les pompiers.

Opérations pilotes à Paris

Deux extensions, réalisées en ossature de bois Douglas certifié, ont finalement pu être ajoutées, l’une en toiture et l’autre en rez-de-jardin sur cour. Un diagnostic initial précis de la structure de l’immeuble a permis de constater son bon état général. Seuls les planchers en poutrelles hourdis, ayant révélé des flèches importantes, ont dû être repris par des planchers bacs collaborants. Les façades ont été conservées, mais doublées d’une isolation intérieure en laine de chanvre et dotées de nouvelles menuiseries en pin certifié PEFC, avec double vitrage 4/20/4 mm.
Pour ne pas surcharger l’édifice, la surélévation a été construite en ossature poteaux-poutres bois posée sur l’ancienne structure. Une partie de la nouvelle toiture a été végétalisée, tandis que 32 m² de panneaux solaires thermiques et 25 m² de panneaux photovoltaïques ont été intégrés. Résultat, la résidence comprend 34 logements étudiants, 55 logements sociaux, des locaux communs en toiture et un commerce au rez-de-chaussée. Malgré la surélévation en R 8, l’immeuble a conservé son statut de logement collectif de 3 e famille A (limité normalement à R 7 selon le Code de la construction et de l’habitation), le dernier étage n’étant pas destiné à du logement. Une classification en 3 e famille B aurait imposé des dispositions de sécurité plus contraignantes. Le projet a reçu une des premières certifications Patrimoine habitat et environnement (PHE) pour une réhabilitation à Paris.
Une autre opération dans la capitale, en cours de réalisation cette fois (livraison prévue en février 2013), concerne un foyer de travailleurs du xiii e arrondissement, qui va être surmonté d’une rehausse de deux à trois étages en bois (voir Focus page précédente).

Surélévations aux multiples fonctions

À Vélizy-Villacoublay (78), une surélévation de 75 logements répondant aux normes BBC est également en cours de réalisation (livraison prévue en septembre 2013). Le projet porte sur deux immeubles résidentiels de 89 logements appartenant à la Semiv (Société d’économie mixte immobilière de Vélizy) et datant de 1970.
Positionnés à angle droit, les deux bâtiments de quatre étages vont être chapeautés et reliés entre eux grâce à la construction de deux nouveaux étages à ossature légère en bois. Dans le même temps, trois niveaux de parking souterrains seront créés et les circulations verticales par ascenseurs et escaliers reconstruites. Des sondages de l’existant (sol, fondations, structures) ont été effectués, afin d’assurer la faisabilité de l’opération.
La surélévation d’immeuble peut également être effectuée dans d’autres buts que celui de créer des logements supplémentaires. C’est le cas sur trois tours d’habitation des années 70 à Granville dans la Manche, où en 2011 une opération de rénovation thermique BBC-Effinergie a été complétée par la construction sur les toits de charpentes en bois de 7 m de hauteur. Des coiffes imposantes uniquement destinées à la pose de 150 panneaux solaires photovoltaïques (730 m²), mais visant à procurer aux tours une autonomie énergétique.
La surélévation et l’aménagement des toits en milieu urbain pourraient à l’avenir favoriser la création de nouveaux espaces de vie, d’activités ou de détente, à l’instar de certains sommets de gratte-ciel outre-Atlantique qui accueillent terrains de sport, cinémas, bars, jardins ou potagers…

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