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Enveloppe du bâti : l’innovation n’est plus prioritaire

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Enveloppe du bâti : l’innovation n’est plus prioritaire

LA MISE EN ŒUVRE DE MATÉRIAUX et de finitions fiables et éprouvés ne remet pas en cause l’innovation architecturale .

Expériences mal vécues, résultats décevants à moyen terme… le foisonnement technique des années quatre-vingt paraît lointain. Le credo actuel : raisonner en coût global et maîtriser les dépenses.

L’habitat social a toujours été un moteur fort de l’innovation technique. Au niveau de l’enveloppe, les industriels comme les maîtres d’ouvrage ont depuis plusieurs décennies dépassé la simple notion de peau extérieure ou de maçonnerie. Ils y ont intégré d’autres fonctions : isolation, renouvellement de l’air, structures à isolation dynamique… et imaginé de nouvelles façons de construire. Pourtant, qu’il s’agisse de construction neuve ou de rénovation, l’innovation peine de plus en plus à dépasser le stade expérimental.

Les composants doivent générer moins de déchets

Si l’innovation reste d’actualité, il faut qu’elle puisse se traduire rapidement par des gains réels en matière d’organisation de chantier, d’économie et de pérennité. Qu’il s’agisse de rénovation et plus encore de neuf, les chantiers actuels, essentiellement axés sur des opérations de petite ou moyenne taille, réclament des systèmes s’adaptant sans perte de temps à des architectures peu répétitives. En rénovation, les traitements des points particuliers doivent rester simples, discrets et fiables. Les composants utilisés doivent générer, par l’optimisation de leurs dimensions, le moins de déchets possibles. Dans tous les cas de figure, les parements doivent permettre un entretien limité et résister durablement à tout type d’agression, tag et graffiti.

Les peaux extérieures généralement prescrites cherchent à intégrer l’ensemble de ces contraintes par : des finitions suffisamment lisses ou faiblement structurées, réduisant l’encrassement et espaçant les fréquences de nettoyage et/ou de ravalement,

– des parements teintés dans la masse ou recevant des finitions très résistantes afin de limiter à un simple nettoyage l’entretien courant,

– des matériaux s’adaptant, par leur résistance et leur entretien limité, aux parties basses et aux axes à forte circulation générateurs de pollutions,

– des accessoires adaptés aux points singuliers pour les systèmes d’isolation thermique par l’extérieur (ITE).

La simplification et la sécurisation des systèmes de fixation apportent une fiabilité supérieure dans le contexte d’une main d’œuvre souvent insuffisamment qualifiée. En construction neuve, les systèmes les plus retenus restent classiques.

Maçonneries innovantes : coûteuses et délicates

Brigitte Brogat, ingénieur et conseiller technique à l’Union sociale pour l’habitat, précise : « Trop de procédés développés dans le cadre de recherche d’économies d’énergie ou d’optimisation des temps de pose n’ont pas répondu à nos espérances. De nombreuses expérimentations ont montré des coûts d’investissement plus élevés que prévu, des mises en œuvre parfois complexes et inadaptées pour une main d’œuvre de formation inégale. De plus, et surtout, les résultats en termes d’économies d’énergie, d’entretien et de temps de retour n’ont pas toujours été au rendez vous ». Citons les systèmes pariéto, perméo et thermodynamiques qui n’ont pas atteint les résultats envisagés, essentiellement pour des raisons de coût, mais aussi de manque de maîtrise de la perméabilité à l’air. Également très répandus dans les années quatre-vingt en rénovation, les procédés d’isolation par l’extérieur n’ont jamais réellement « percé » en construction neuve pour des raisons de surcoûts, de fiabilité et de temps de retour sur investissement trop élevés. Le constat est identique pour les maçonneries innovantes, comme les blocs coffrants en polystyrène, perçus comme coûteux et délicats à mettre en œuvre. Idem pour ceux à base de ciment qui, tout en présentant l’intérêt d’un aspect fini, résistant et très calibré, n’ont jamais pu « rentrer » dans les financements habituels de l’habitat social.

Le béton cellulaire, marginal dans le neuf

Autre voie qui semblait prometteuse il y a 20 ans, les maçonneries à isolation répartie qui utilisent leur structure comme isolant. Le béton cellulaire en est l’application la plus connue, mais là encore son utilisation reste marginale dans les programmes neufs. Ce matériau est, par ailleurs, beaucoup plus prescrit dans les opérations de rénovation, pour des raisons de moindre surcharge sur les structures existantes. Dans le même registre, des expérimentations réalisées par ELF avec de la mousse de verre expansée sont restées sans suite pour des raisons de difficulté d’industrialisation et de prix de revient. On peut aussi mentionner les blocs de pierre ponce, ou encore les briques de chanvre, testées en tant qu’éléments de remplissage dans le cadre de quelques opérations HQE (1). Finalement, ce sont les maçonneries les plus classiques (parpaings et briques) qui restent majoritairement mises en œuvre, au travers de produits classiques ou de leurs évolutions. Dans le secteur de la terre cuite, le Monomur, et dans une moindre mesure la brique hauteur d’étage de Terreal (Guiraud) sont régulièrement prescrites pour leurs qualités d’isolation, mais aussi pour la pérennité reconnue de la terre cuite. À suivre aussi, les joints minces : ils réduisent le temps de pose, mais imposent une plus grande précision de mise en œuvre. D’ailleurs, cette technique se décline également avec les blocs béton, des produits qui proposent de la valeur ajoutée avec des variantes pour l’instant peu utilisées, comme les blocs constitués de granulats d’argile expansé. D’autres intègrent une isolation extérieure, tel le bloc RTH 85, lancé il y a plus de quinze ans. Il est composé de deux éléments en béton d’épaisseur différente (8 cm à l’extérieur, 15 à l’intérieur), reliés mécaniquement par un isolant polystyrène.

À signaler également, le système Greybloc, un parpaing qui simplifie la mise en œuvre des canalisations, pieuvres et autres réseaux. Enfin, l’ossature bois comme l’ossature acier n’ont pas convaincu massivement les maîtres d’ouvrage sociaux. Et ce malgré les qualités de ces matériaux et de nombreuses opérations pertinentes, particulièrement dans le domaine de la maison individuelle.

Moins d’isolation par l’extérieur

Même en rénovation, leur domaine de prédilection, les systèmes d’isolation par l’extérieur sont de moins en moins prescrits. Plusieurs raisons existent :en premier lieu, les budgets ne permettent pas toujours de mettre en œuvre de tels systèmes ; ensuite, une certaine déception liée à la fragilité et au manque de fiabilité de certains procédés a rendu méfiants des maîtres d’ouvrage. Enfin, une esthétique parfois voyante n’a pas été toujours bien perçue, tout en se démodant assez rapidement. Actuellement, de nombreux comanditaires préfèrent investir dans des chaudières performantes et dans des vitrages peu émissifs, plutôt que d’employer cette dernière solution. Pourtant, les fabricants ont réalisé d’importants progrès, avec des systèmes plus discrets et qui s’intègrent plus aisément dans le bâti environnant. Si les enduits minces sur isolant représentent toujours plus de la moitié des surfaces couvertes, d’autres peaux extérieures arrivent à conserver ou à prendre une place significative, variable selon les tendances esthétiques :

– les clins à base de bois ou d’aspect bois répondent à une demande actuelle en termes d’aspect, de rapport qualité/prix et de coût d’entretien ;

– les panneaux à base de résines thermodurcissables ou de contreplaqués spécialement traités sont très résistants aux différentes agressions (humidité, chocs, pollution, vandalisme), tout en nécessitant également peu de maintenance ;

– les bardages en terre cuite évoluent fortement (aspect, formats et fixations) : différents fabricants proposent des éléments de dimensions importantes, très horizontaux et posés bord à bord. Ces produits intéressent d’ailleurs autant l’habitat que le tertiaire ;

– les bardages en fibres ciment s’articulent autour d’une offre entièrement renouvelée, avec des produits qui se déclinent sous de multiples versions, du clin aux panneaux de grande taille et de forte épaisseur permettant toutes sortes de combinaisons de teintes et de textures.

Traiter les baies et créer des modénatures

Le traitement des baies et des points particuliers prolonge au niveau des ouvertures tout projet de façade. Les blocs-baies permettent de traiter des ouvertures complètes, et les modénatures requalifient à peu de frais des façades trop banales. Ces systèmes, qui restent peu utilisés sur les opérations neuves, apportent une qualité de finition et une précision difficiles à obtenir sur chantier, avec un temps de pose réduit. Les plus couramment employés sont :

– les blocs-baies en béton ou composites destinés à la construction neuve. Plusieurs fabrications intègrent les menuiseries et les fermetures en usine, pour une simplification et une rapidité de pose accrues ;

– des modénatures diverses, composées de béton de fibres, de verre-polyester, de verre ciment, permettent d’obtenir des pièces de formes complexes, légères et de taille importante. Corniches, encadrements, frontons, blocs baies… Ces procédés, assez utilisés en rénovation, renouvellent l’esthétique de la façade, et les matières et textures proposées apportent en général une grande résistance aux différentes pollutions et agressions ;

– les petits éléments préfabriqués, sous forme de pierres ou de briques, permettent de réaliser des éléments d’appuis, de seuils, des éléments d’angles, des frontons. Réalisés en pierre reconstituée, ils sont mis en œuvre par scellement, collage ou agrafage.

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