Contrôleur technique : vers une limitation de sa responsabilité

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Contrôleur technique : vers une limitation de sa responsabilité

© (Doc. R. Bourguet.)

L’ordonnance du 8 juin 2005 devrait atténuer la sévérité de la jurisprudence à l’encontre du contrôleur technique qui pouvait, jusqu’à maintenant, être reconnu comme responsable in solidum de tout ou partie des dommages survenant à un ouvrage.

La loi du 4 janvier 1978 précisait que le contrôleur technique a une mission de prévention des aléas techniques de la construction. Il est contractant du maître d’ouvrage et c’est à ce dernier qu’il remet son avis relatif à la solidité de l’ouvrage et à la sécurité des personnes. Le recours au contrôleur technique est obligatoire pour un certain nombre d’ouvrages précisés dans le code de la construction et de l’habitation. L’indépendance du contrôleur technique est assurée grâce à deux mesures : cette activité est incompatible avec toute autre mission concernant l’ouvrage en question : conception, exécution, expertise, et elle doit faire l’objet d’un agrément. Le contrôleur est soumis à la présomption de responsabilité décennale des constructeurs, en principe dans les limites de la mission déterminée dans le contrat passé avec le maître d’ouvrage.

La Cour de cassation a porté une appréciation sévère sur la responsabilité du contrôleur technique considérant, dans ses décisions, que la mission ne se limitait pas aux strictes termes du contrat, (vérification des normes et DTU) mais qu’elle comportait aussi l’obligation de vérifier les éléments constitutifs du projet ou les conditions d’exploitation des locaux. Le contrôleur technique est considéré comme un constructeur, étant lié au maître d’ouvrage par un contrat de louage d’ouvrage, alors que son rôle, spécifique, de vérification et de conformité, diffère de celui du maître d’œuvre et de l’entrepreneur. Un arrêt récent de la 3e Ch. de la Cour de cassation du 22 juin 2005 condamne le contrôleur technique aux motifs que son silence gardé sur la non-conformité de l’installation aux normes techniques, constitue une faute dolosive, sans que soit observée une faute commise de propos délibéré, ni la volonté de réaliser le dommage.

Les limites de ses obligations contractuelles

L’obligation d’information pesant aujourd’hui sur le contrôleur technique, comme sur tout professionnel, peut faire apparaître comme une faute de mauvaise foi, toute dissimulation, tout silence envers le maître d’ouvrage relatif à une norme et même à un simple avis ou à une interprétation nouvelle d’une instruction technique.

De surcroît, les condamnations in solidum, prononcées par les juridictions, peuvent entraîner pour le contrôleur technique l’obligation de concourir, pour partie ou même pour le tout en cas de défaillance des autres constructeurs, à la réalisation de l’entier dommage dont le maître d’ouvrage, ou l’acquéreur, peuvent lui demander l’indemnisation totale. Dans ce cas, aucune clause contractuelle de limitation de responsabilité, ni même le rappel que cette dernière ne pouvait être recherchée que dans les seules limites de sa mission, ne pouvait exclure les conséquences d’une condamnation in solidum.

L’ordonnance du 8 juin 2005, qui concerne les « dispositions relatives à l ‘assurance et à la responsabilité dans le domaine de la construction » du contrôleur technique, devrait atténuer la sévérité de la jurisprudence à son encontre. En effet, elle complète les dispositions le concernant dans le code de la construction et de l’habitation. Elle précise les limites de sa mission et limite sa responsabilité au strict contenu de son contrat. Il est ainsi ajouté aux termes de l’article L. 111-23 : il intervient à la demande du maître d’ouvrage et donne son avis à ce dernier sur les problèmes d’ordre technique, dans le cadre du contrat qui le lie à celui-ci. Il appartiendra à la jurisprudence de marquer les limites de l’obligation de conseil du contrôleur technique au regard des seules dispositions de son contrat. Il est évident que ce contrat doit être rédigé avec clarté et précision, sans ambiguïté sur l’étendue de sa mission au regard de l’ouvrage concerné.

L’article L. 111-24 est complété par l’alinéa suivant : « Le contrôleur technique n’est tenu vis-à-vis des constructeurs à supporter la réparation de dommages qu’à concurrence de la part de responsabilité susceptible d’être mise à sa charge dans les limites des missions définies par le contrat le liant au maître d’ouvrage. » Cette disposition devrait empêcher toute condamnation in solidum du contrôleur technique au-delà de la part de responsabilité mise à sa charge par la décision de justice.

Pour en savoir plus :

Cass. 3e Civ. 2 février 2005 : RDI 2005 n° 3 p. 223,

Cass. 3e Civ. 22 juin 2005 : RDI 2005 n° 5 p. 338,

Ordonnance du 8 juin 2005 JO du 9 juin

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