Thomas Le Diouron, le fondateur d'Impulse Partner, gère la mise en relation entre les grands groupes du BTP et les start-ups - © A.F.
Thomas Le Diouron, le fondateur d’Impulse Partners, l'accélérateur de start-ups en charge du Cement Lab, dresse un premier bilan encourageant de cette structure visant à rapprocher l'écosystème du BTP et les start-up. Il appelle les industriels à mieux identifier le potentiel de développement des solutions et à entamer la phase d'industrialisation.
Créé il y a un an sous l’impulsion de l’industrie cimentière, le Cement Lab a multiplié les rapprochements entre l'écosystème du BTP (cimentiers, entreprises générales, architectes, bailleurs sociaux…) et les jeunes pousses issues du digital et de l'IA, autour des nouvelles applications du ciment et du béton. Thomas Le Diouron, le fondateur d’Impulse Partners, l'accélérateur de start-ups en charge du Cement Lab, dresse un premier bilan.
Quelle est la vocation du Cement Lab ?
Le Cement Lab est une initiative portée par l’industrie cimentière dans l’objectif de rapprocher les cimentiers, leurs parties prenantes et toute la filière du béton avec des start-up agiles et très en pointe sur le digital, la robotique, l’intelligence artificielle, ….
Quel est le rôle d’Impulse Partners ?
Notre rôle est de faciliter les rencontres entre les acteurs de l’innovation et le monde du béton. Notre but est de confronter les start-up au marché, afin qu’elles puissent affiner leur business plan et dénicher leurs clients. Nous tentons d’augmenter la surface d’échange entre deux mondes qui, traditionnellement se parlent peu, ont peu l’occasion de se croiser dans des forums classiques. Les start-up que nous accompagnons ont la garantie de rencontrer tous les acteurs pertinents du BTP.
"Nous avons réussi à impliquer non seulement les acteurs de la filière du béton et du ciment mais aussi leurs clients, architectes, bailleurs sociaux, prescripteurs, maîtres d’ouvrage"
Quels ont été les temps forts du Cement Lab depuis sa création il y a un an ?
Il y a eu 3 grandes rencontres qui se sont tenues au sein de la Station F. Tout au long de l’année, nous repérons des start-up en France et à l’international et nous organisons des contacts avec les acteurs du BTP et de l’industrie. Nous avons animé pendant un an une plateforme d’échange pour rapprocher les porteurs de projets et les acteurs du BTP. Les start-ups pitchent, se présentent devant un panel d’industriels qui confrontent leurs projets et évaluent le potentiel d’application dans leur métier.
Quel bilan tirez-vous de cette première année ?
Nous avons réussi à impliquer non seulement les acteurs de la filière du béton et du ciment mais aussi leurs clients, architectes, bailleurs sociaux, prescripteurs, maîtres d’ouvrage… Nous avons détecté une petite centaine de sociétés innovantes dont une cinquantaine de véritablement pertinentes pour apporter de la valeur dès aujourd’hui sur les métiers du ciment et de ses usages.
Il y a une vingtaine de start-up qui sont en relation avec différents industriels sur des projets de collaboration, soit sur de l’investissement. Avec l’open innovation, la plupart des industriels sont en train de créer chez eux des capacités de collaboration et d’investissement dans des start-ups. Le Cement Lab accélère les rencontres et apporte des idées à ces initiatives internes.
"Les fondateurs de ces start-up disposent souvent d’une expérience de 10 à 15 ans dans le monde du BTP et de l’industrie"
Comment les industriels se positionnent-ils vis-à-vis des start-up ?
Les collaborations prennent généralement la forme de prestations achetées aux start-up, des études, des services ou du matériel. Dans certains cas, la stratégie peut aboutir à une prise de participation dans le capital de ces jeunes sociétés mais cela ne va pas plus loin. Car les industriels ont tous compris que le rachat d’une start-up risque de freiner son élan d’innovation. Le schéma classique, c’est une prise de participation à hauteur de 15 à 20% du capital.
Quels bénéfices une start-up peut-elle retirer d’un rapprochement avec un grand groupe ?
Ce rapprochement participe à soutenir son activité et contribue à lui apporter une référence avec un grand nom de l’industrie auprès de ses clients. Le soutien apporté par un grand groupe va aussi lui apporter une meilleure crédibilité vis-à-vis des autres investisseurs qu’elle pourrait aller solliciter.
Quel est le profil de ces start-ups ?
Ce sont de jeunes sociétés avec une moyenne d’âge de 2 à 3 ans, la plupart issues du monde du digital et de la tech ou de la robotique. Elles ne réalisent pas encore de chiffres d’affaires. Leur effectif se compose de 2 à 3 personnes, de profils plutôt techniques. Les fondateurs disposent souvent d’une expérience de 10 à 15 ans dans le monde du BTP et de l’industrie.
Ce ne sont pas des jeunes qui démarrent mais ce sont souvent des entrepreneurs qui font partie du même milieu et qui ont identifié une niche ou un secteur qui représentent un nouveau business. Elles ont déjà élaboré un prototype qui fonctionne mais elles ne savent pas forcement comment l’industrialiser et à quel prix.
"Besoin de bien qualifier les enjeux"
Dans quels domaines d’applications interviennent-ils ?
Dans le Cement Lab, nous avons identifié des start-up sur tous les domaines de la filière : depuis la performance industrielle des usines, la logistique, la préfabrication, la mise en œuvre des bétons sur les chantiers ainsi que le recyclage des matériaux.
Par exemple l’impression 3D combine de la robotique avec le calcul optimisé de formes à imprimer. Pour le réemploi de matériaux, l’idée est de créer une plateforme digitale, une sorte de Airbnb des matériaux recyclés, ils vont gérer la logistique, les taxes, les paiements, etc.
Que peut-on vous souhaiter pour 2019 ?
Il faut continuer sur la même lancée. Nous continuons à alimenter la filière avec des solutions start-up, et nous comptons sur la prise de conscience des industriels pour être encore plus agiles et mettre en œuvre les solutions des start-ups. Il y a parfois des discussions trop intellectuelles sur la techno d’une start-up alors qu’il est souvent facile de tester et d’être fixé.
Nous sommes aussi conscients que les start-up ne sont pas la solution à tout et que la mise en œuvre des solutions de start-up demande un effort pour l’industriel. D’où le besoin de bien qualifier les enjeux et d’estimer le potentiel de déploiement industriel des solutions.