Les parois en béton de chanvre du bâtiment seront recouvertes, en toute logique de compatibilité, par un enduit chaux aérienne sable de couleur terre de 1,5 cm d’épaisseur (Tradical PF 80). Végétalisation et tuiles de bois se partageront la toiture. L’ensemble s’intégrera dans un environnement paysagé. (Doc. Batiethic.)
Par choix éthique, mais aussi pour répondre à l’ensemble des contraintes d’hygrométrie et de régulation thermique nécessaires à un espace abritant des animaux, les maîtres d’œuvre et d’ouvrage ont opté pour un béton de chanvre projeté sur ossature bois cintrée de grande hauteur.
Souvent précurseurs et visionnaires, les fondateurs et propriétaires du Parc zoologique et de loisirs de Thoiry (78) - établissement fondé par Paul de La Panouse et actuellement dirigé par ses enfants, Colomba de La Panouse-Turnbull et Edmond de La Panouse - innovent en construisant, dans l’enceinte du parc, un ouvrage unique.
Baptisé « l’Arche des Petites Bêtes » et dédié aux animaux de petite taille tels qu’amphibiens, invertébrés et petits mammifères, ce nouveau lieu de 500 m
Un amortisseur thermique
L’option ossature bois et remplissage chanvre a été imposée par la maîtrise d’ouvrage qui souhaitait des matériaux à faible impact environnemental - faible émission de CO2, facilité de déconstruction, recyclage… Les murs en chanvre projeté ont également été choisis pour répondre aux nombreuses contraintes thermiques et hygrométriques liées à la destination de l’ouvrage : « Éviter la surchauffe en été pour assurer la protection des espèces en recourant le moins possible à la climatisation tout en assurant l’homogénéité de l’ensemble ».
C’est donc les qualités intrinsèques du béton de chanvre - isolation thermique et acoustique, régulation hygrométrique, inertie thermique - qui ont fait pencher la balance par rapport à l’option paille qui avait également été envisagée. Par exemple, l’inertie thermique permet de gérer au mieux les brusques écarts de température extérieure, en été comme en hiver (déphasage de cinq heures pour 20 cm d’épaisseur), le mur agissant alors comme un amortisseur thermique.
Une triple ossature
Sur le plan technique, le fait que les murs soient bombés à l’extérieur (effet coque de bateau), incurvés dans les angles et d’une hauteur importante (5,20 m), a imposé une étude spécifique. Structures principale et secondaire ont fait l’objet de toutes les attentions.
Résultat, trois ossatures distinctes articulent le projet : une ossature principale (35 x 20 m) charpente poteaux-poutres en lamellé-collé, l’ossature de la coque (50 x 20 m) et une ossature secondaire (27 x 5,20 m de hauteur et 17 m de largeur) insérée dans la coque. L’ossature secondaire prenant appui, en partie basse, sur un soubassement maçonné et, en partie haute, sur la panne sablière en lamellé-collé. Sa trame varie de 50 à 65 cm avec des membrures de 50 x 150 mm.
Le béton de chanvre, lui, est issu d’un procédé maintenant bien connu. Le couple chaux aérienne/chanvre - chaux Tradical PF70 BCB et granulats de chanvre Chanvribat - est validé et conforme aux Règles professionnelles qui régissent l’emploi de ces matériaux. En particulier, les tests de durabilité et de résistance en compression témoignent d’une cohésion optimale. Ainsi, le béton de chanvre résiste à vingt cycles gel/dégel réalisés selon la norme NF B10-512, ce qui équivaut au résultat que l’on obtient avec une pierre tendre. Mélangé puis projeté, le complexe a une masse volumique de 30 kg.m
Projection : une solution adaptée aux courbes
À l’instar de la structure, le processus de mise en œuvre a fait l’objet d’une étude spécifique : « Pour répondre aux formes complexes du bâtiment, nous avons d’abord pensé recourir à une mise en œuvre dans des banches par passe de 50 cm de hauteur. Après un essai, nous avons abandonné cette solution qui s’est révélée beaucoup moins rapide que l’option projection », explique Benjamin Leroux, gérant de l’entreprise applicatrice Batiethic. Mais pour l’option projection se posait le problème de l’accroche du béton de chanvre projeté sur l’ossature : « Nous avons décidé avec le bureau d’études structure de fixer, sur les montants de l’ossature secondaire, un tasseau supplémentaire en débord pour faciliter l’accroche du mélange et la cohésion de l’ensemble ».
Autre point important : le choix de la technique de pose. « Nous nous sommes posé la question de savoir comment coffrer - coffrage ou non des deux côtés - et projeter - projection intérieure et/ou extérieure ? Finalement, pour plus de facilité, nous avons opté pour un coffrage extérieur et une projection par l’intérieur. » Résultat : le mélange est projeté depuis l’intérieur entre les montants verticaux de la structure secondaire. Projection en bout de lance en épaisseur variable pour réaliser la forme bombée souhaitée par le maître d’ouvrage. Pour y parvenir - et c’est une première - la projection est réalisée en deux étapes : le coffrage courbe est placé en partie basse pour exécuter un voile d’épaisseur croissante de 20 à 30 cm de bas en haut.
Puis, le coffrage est retourné pour la réalisation de la seconde partie du mur bombé, de 30 à 20 cm au niveau de la panne sablière à 5,20 m de hauteur. Après projection, l’ensemble est arasé au nu des montants bois et prêt à recevoir le revêtement de finition.