Le profil de toiture incurvé du bâtiment évoque le « paysage de sheds ». (Doc. DR.)
Avant d'effectuer les travaux de terrassement pour réaliser une patinoire, la Ville de Troyes a dû gérer la prise en charge des déblais contaminés, mis en évidence lors des études de dépollution des anciennes teintureries.
Depuis le XIXe siècle, les sheds marquaient de leur motif crénelé le paysage urbain du site de la teinturerie des Bas-Trévois, à Troyes. Fermé au début du xxe siècle, l'ancien établissement avait été rasé dans les années 1990. Afin de mettre en valeur les vestiges du patrimoine industriel (cheminée, bâtiment séchoir mitoyen), le terrain a alors été requalifié en zone de loisirs, avec sur l'emprise correspondant aux ateliers principaux, la réalisation d'une patinoire sans niveau de sous-sol.
Conformément à la méthodologie française relative aux sites et aux sols potentiellement pollués, la ville de Troyes a sollicité en 2004 le bureau d'études Soler Environnement pour réaliser le diagnostic approfondi d'un terrain de 3 160 m2. Trente sondages réalisés sur une profondeur de 2 m ont mis en évidence des composés organochlorés volatils (trichloréthylène) et des traces de pollution aux solvants chlorés dans les eaux souterraines. Compte tenu du nouvel aménagement en patinoire et des zones de voiries, il a été nécessaire d'évaluer les risques sanitaires et de recenser précisément les polluants.
L'évaluation a mis en évidence les zones de pollution au trichloréthylène sur 3 m de profondeur, des contaminations au plomb, à l'arsenic et en hydrocarbures, toutes vraisemblablement liées aux activités antérieures. L'arsenic en particulier était souvent utilisé pour les pigments. Le diagnostic approfondi a mis en évidence des valeurs de métaux dans le sol sur la tranche superficielle, supérieures aux Valeurs de définition de source sol (VDSS). Cette valeur guide servait à identifier une source de pollution de sols et à délimiter sa surface. Ces valeurs sont à utiliser lors d'une évaluation simplifiée des risques. En l'occurrence, du plomb et de l'arsenic ont été retrouvés dans un volume de 200 m3 ainsi que des hydrocarbures et des composés organiques volatils, dont le trichloréthylène, de 0,11 mg/kg à 3,5 mg/kg, entre 0 et 3 m de profondeur (3 700 m3). Malgré les pollutions présentes, les études ont conclu que le site était sans risque, dans la mesure où l'élaboration d'une patinoire, dont l'épaisseur de protection du sol est particulièrement conséquente, devait être construite au droit des sols pollués. Les terres polluées pouvaient rester en place tant que les sols sont recouverts en surface. En revanche, les terres chargées en composés organiques volatils devaient être évacuées lors des travaux. Pour les aménagements générant des déblais, les terres excavées devaient être évacuées en filière de traitement spécifique, suivant le protocole de gestion des terres polluées. La Drire a donc rendu son avis favorable en 2007 pour la réhabilitation en patinoire.
Les actions ont concerné aussi bien la nappe phréatique que les terres polluées. Pour la nappe, son gradient hydraulique relativement faible et la présence à proximité d'un bras de Seine ont permis aux experts d'estimer que la pollution était limitée. La pollution présentait en outre peu de probabilité de se propager. Le bureau d'études a donc simplement mis en place une surveillance de la qualité de l'eau de la nappe à partir d'un réseau de piézomètres installés à 7 m de profondeur.
Évacuer 796 tonnes de déchets
L'évacuation de terres polluées est un problème complexe, rarement pris en compte, alors qu'il peut avoir des impacts financiers importants. L'acceptation des terres en décharges n'a lieu qu'après une analyse des lixiviats. Une pollution n'étant avérée que lorsque la concentration est supérieure à la VDSS. L'analyse des prélèvements au moyen notamment de tests de lixiviation a servi à identifier les filières de traitement. Résultats : 50 % des terres excavées ne pouvaient être évacuées vers une installation de stockage de déchets inertes. Le recours à une filière spécifique était donc nécessaire. Au terme de la prestation, un total de 796 tonnes de déblais ont été évacués vers le centre de stockage de déchets de classe 2 de Montreuil-sur-Barse (Aube), exploité par Valest, filiale d'Onyx. Chaque transport était accompagné d'un Bordereau de suivi des déchets (BSD) qui reprend les diverses informations liées au déchet (sa nature, l'identité du producteur et du transporteur ainsi que sa destination finale) et le suit jusqu'à son élimination finale. En fin de chantier, une copie de chaque BSD attestant de la traçabilité des évacuations et de l'élimination des déblais a été remise au maître d'ouvrage et intégrée dans le rapport d'exécution des travaux. Malgré l'absence de risque sanitaire à terme, les travaux d'aménagement de la patinoire induisaient tout de même la manipulation et la gestion de terres polluées, en particulier pour les terrassements nécessaires aux fondations. Dans ce contexte, l'entreprise OGD Ortec fut mandatée par la ville en 2008 pour dépolluer le sol et gérer les terres extraites. Une fois localisés, les matériaux suspects ont été excavés et stockés sur site par lots de 15 m3.