« Coffre-fort » en béton pour le stockage de vins de prestige

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« Coffre-fort » en béton pour le stockage de vins de prestige

L’enveloppe blanche de 12 m de haut du bâtiment a été pensée comme un bloc solidaire, monolithe, qui se distingue de la forêt, notamment sous le feu de son subtil éclairage. (Doc. Arthur Pequin.)

Afin de faire face à la réglementation incendie tout en sortant du cadre classique de l’entrepôt métallique,les concepteurs ont conçu cet entrepôt comme une « sculpture », un bloc monolithique entièrement fermé.

À la suite d’un projet avorté du fait de la crise qui a frappé le secteur viticole en 2008, l’agence Baggio-Piechaud et son client Ballande et Méneret ont relancé l’idée de création d’une unité de stockage sur un terrain possédé par l’entreprise à Ludon, dans le Médoc.

Le bassin d’eau et les pins qui recouvraient la surface concernée furent déterminants pour ce nouveau projet, à la fois pour répondre à la très contraignante réglementation qui entoure le vin et les alcools et pour jeter les bases esthétiques du bâtiment. Le stockage de vin, produit classé « inflammable », posait problème aussi bien au niveau de la conception du bâtiment que vis-à-vis des voisins.

L’idée d’origine qui consistait en l’implantation d’un showroom devant l’entrepôt, a été abandonnée, en partie à cause de ses lourdes contraintes. De son côté, l’agence Baggio-Piechaud refusait d’imaginer la création d’une boîte en métal noire ou grise, caractéristique de ce type d’installation, pour stocker les meilleurs vins du monde. Celle-ci a alors exploité deux éléments clés : la fonction « coffre-fort » que le bâtiment endossait – celui-ci avait, en effet, pour but de stocker des vins de très haute gamme en toute sécurité – et le bassin déjà présent sur le terrain. Les architectes ont alors pensé un « bâtiment sculpture », ne comprenant aucune ouverture dans sa façade principale, une sorte de « coffre-fort en béton ». Le choix du matériau de construction était un autre élément d’importance. Le béton résolvait tous les problèmes liés au feu, il permettait d’atteindre l’esthétique souhaitée par les architectes et offrait les qualités techniques indispensables au projet, principalement en matière d’inertie : les vins devant être conservés à une température parfaitement maîtrisée (entre 14 et 18 °C). C’est sur sa dimension patrimoniale et ses qualités techniques que le projet basé sur une conception « tout en béton » a convaincu Ballande et Méneret, ainsi que la commune en mai 2009. Le bassin permettait quant à lui de répondre aux normes de sécurité incendie en fournissant une réserve suffisante à l’extinction d’un incendie. Celui-ci a toutefois nécessité un traitement par oxygénation et une installation technique, etc.

En terme d’enveloppe, l’environnement forestier, chargé en pollen, en humidité et en micro-organismes, nécessitait l’usage d’un béton autonettoyant, pour éviter les coulures et salissures qui deviennent vite disgracieuses. Autre contrainte, la nécessité de réaliser des voiles de grande dimension (12 m de haut et 100 m de large), afin de stocker un maximum de bouteilles et de caisses de vin tout en respectant les contraintes de PLU en hauteur. Architecte et bureau d’études ont opté pour un ciment TX Arca de Ciments Calcia pour la réalisation de l’ensemble des voiles. Ce ciment qui entre dans la composition du béton autoplaçant Isytecvoil, a permis de couler les voiles sur place, d’obtenir un « effet monolithe » et une qualité de parement très soignée. Le résultat est un bâtiment carré en béton blanc, de près de 10 000 m², qui culmine à 12 m de hauteur et se reflète dans le bassin. Pour éclairer la façade principale de l’édifice, des leds de couleur ambre ont été placées dans les trous de banches du mur, appuyées par des projecteurs à diode. À l’intérieur, des plaques de liège ont par ailleurs été disposées contre les murs en guise d’isolation.

Un coulage ultraprécis

À suite d’un appel d’offres, c’est Eiffage construction Atlantique qui a été sélectionné pour toute la partie gros œuvre du chantier. L’entreprise a creusé puis coulé les fondations en décembre 2009, avant de s’attaquer aux voiles périphériques dès janvier 2010. Ceux-ci sont constitués de longrines, qui vont de massifs en massifs en pieds de voiles. Ces derniers servaient de talonnettes de reprise pour les voiles. Des plans de calepinage des murs ont été conçus par les architectes, avec l’appui d’Eiffage. Un petit mur test a également été réalisé pour visualiser l’aspect du béton, avec la technique employée et les caractéristiques sélectionnées.

Le chantier s’est caractérisé par des plannings très serrés et des cadences de coulage et d’opérations très importantes. En effet, les voiles de 12 m de haut ont été coulés sur 10 m de large, tous les jours pour un total de 480 m. Ce qui représente environ 23 m3 de béton par jour. Eiffage a divisé ses équipes en deux groupes : l’un décoffrait et coffrait les banches qui allaient faire un voile, l’autre finissait de coffrer et coulait dans les banches déjà prêtes. Les manipulations sur les voiles duraient ainsi de six à vingt heures, et ce, de janvier à fin mars. Dans une journée, une phase était de décoffrer, une autre de coffrer et une dernière de couler le béton. Sur le chantier, une équipe façonnait le ferraillage au jour le jour, pour que celui-ci soit ensuite mis en place à l’aide d’une grue, face à une banche. Des raidisseurs étaient positionnés en tête du ferraillage pour rigidifier le tout. Les voiles étaient maintenus provisoirement avec des étais tirants-poussants. Des banches Hussor en inox, de 2,80 par 2,40 m, ont été mobilisées pour l’occasion, celles-ci procurant une finition soignée. Quatre banches de ce type étaient alignées pour pouvoir couler les 10 m de large par jour. Comme les murs en béton devaient être parfaitement finis, Eiffage a débuté le coulage par la façade arrière, celle qui ne se voit pas, afin de roder les techniques et les équipes. La couleur du béton, la mise en place des ferraillages, etc. étaient complexes et ont demandé un certain temps d’adaptation. Les ferraillages étaient contenus dans des panneaux très fins de 20 cm, il fallait les positionner parfaitement pour ne pas les rendre apparents. Ceux-ci faisant 14 cm d’épaisseur, il ne restait que 3 cm d’enrobage de chaque côté.

Ce qui explique la mise en place d’une vérification systématique des zones de croisement des ferraillages. Par ailleurs, l’entreprise Hussor est intervenue pour vérifier la pression contenue dans les banches, à l’aide de capteurs de pression, ce qui a permis à Eiffage de déterminer un temps de coulage type, suivant la longueur de la face et le volume de béton à utiliser. Les cadences de coulage ont été fixées sur cette base. Les évolutions de température ont parfois compliqué les opérations, le béton utilisé était fortement chargé en ciment et réagissait de ce fait aux variations de températures. En janvier, au début du coulage, des températures négatives ont été enregistrées.

Les équipes d’Unibéton étaient là tous les jours pour surveiller la manière dont le béton évoluait dans ces conditions : il a parfois fallu repousser le décoffrage d’une face, ce qui se faisait généralement au bout de 10 h de maturité, ou rajouter un peu d’eau ou de ciment aux formules de béton. Une résistance supérieure à 30 MPa avait été fixée par le BET de conception IEE.

La hauteur des murs a par ailleurs nécessité l’usage de cheminées de coulage (deux ou trois par trains de banches), des ancroboxs, afin d’acheminer le béton de manière uniforme tout le long de la hauteur et de la largeur de la face. Une petite partie des coulages s’est initialement faite à l’aide de grues et de bennes. Des pompes ont ensuite été utilisées, afin d’éviter les ségrégations que le premier procédé laissait parfois apparaître sur les faces. EIffage coulait tous les jours, l’entreprise faisait alors du pianotage, elle coulait une face, puis s’attelait à une voilure environ 10 m plus loin, pour ensuite revenir finir les portions manquantes. Des poteaux en béton autoplaçant gris de 8 m de haut et de 60 par 40 cm ont aussi été coulés derrière les voiles. Enfin, entre avril et mai, pour parfaire la finition du bâtiment, la fine pellicule de ciment formée en surface a été poncée, tandis qu’épaufrures et imperfections ont été corrigées à l’aide d’un mortier de reprise blanc classique et, en finition, par du ciment TX Arca.

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